Le récit glaçant et absurde d’un appel d’urgence traité comme une commande au drive. Enquête sur une erreur qui aurait pu être fatale.

Mis en attente pendant un cambriolage : L’incroyable erreur d’un opérateur des secours qui commande un McDo en pleine alerte

CHOC

Il était environ 22h42 ce jeudi soir d’avril 2025 quand Julien, 37 ans, s’est figé. Le bruit d’une vitre brisée venait de briser le silence paisible de son appartement situé au premier étage d’un immeuble résidentiel de Saint-Orens, en périphérie de Toulouse. Il n’eut même pas le temps d’allumer la lumière que des pas discrets, mais bien réels, résonnaient dans le couloir. Quelqu’un était entré.

Sans réfléchir, Julien recula lentement dans sa chambre, ferma la porte sans claquer, saisit son téléphone posé sur la table de chevet et composa mécaniquement le 17. La panique lui montait à la gorge comme une marée noire. Ses doigts tremblaient. Son souffle saccadé.

— « Police secours, bonsoir. »

La voix à l’autre bout du fil était posée, professionnelle. Julien chuchota.

— « Il y a quelqu’un… chez moi. J’habite rue du Moulin… à Saint-Orens. Je crois qu’on me cambriole… »

Un silence. Puis un bruit étrange. Comme le froissement d’un sac, ou un bip électronique. Puis cette phrase, irréelle :

— « Bonjour, je voudrais un cheeseburger, menu maxi best of, avec Coca. Et des frites. »

Julien écarquilla les yeux. C’était… un cauchemar ? Un bug ? Il venait d’alerter la police, pas le McDo du coin. Pourtant, l’opérateur venait de passer une commande. Calmement. Comme s’il était au drive.

Une confusion aussi absurde que dramatique

Ce que Julien ignorait à cet instant, c’est que son appel avait bien été transféré au centre de traitement des appels d’urgence de la Haute-Garonne. Mais en raison d’une erreur humaine, une redirection hasardeuse de ligne s’était déclenchée depuis la plateforme, saturée par un incident technique majeur. Et l’opérateur – qui traitait simultanément plusieurs appels via un logiciel de gestion vocal défaillant – avait activé par erreur une ligne de service secondaire utilisée en interne pour… commander des repas.

Oui, des repas. Une faille jamais détectée jusque-là, mais bien réelle.

L’homme au bout du fil, croyant répondre à un collègue, n’a pas compris que l’appel venait d’un particulier en détresse. Il pensait plaisanter avec un autre agent. Un test micro. Une blague. Alors, il a poursuivi :

— « Tu veux des nuggets avec ? Y’a une promo aujourd’hui… »

Julien a cru devenir fou.

Il a répété, cette fois plus fort : « IL Y A QUELQU’UN CHEZ MOI ! AIDEZ-MOI ! »

Mais la ligne s’est tue. Puis a coupé.

Une cavale de cinq longues minutes

Julien n’a pas attendu que l’opérateur reprenne la ligne. Il s’est glissé par la fenêtre de sa chambre, escaladant le rebord du balcon du voisin du dessous, agrippé comme un félin apeuré. Il a atterri dans un massif de rosiers, déchirant sa chemise et s’écorchant l’avant-bras, mais vivant. Il a couru pieds nus jusqu’au premier bistrot encore ouvert à quelques rues de là.

Le barman, alerté par son visage blême, a immédiatement appelé les secours. Cette fois, l’appel a été pris au sérieux. Une patrouille a été dépêchée. Les agents sont arrivés en moins de 8 minutes. Trop tard.

Le cambrioleur, ou plutôt les cambrioleurs, étaient déjà partis. L’appartement retourné, la télé débranchée, les tiroirs vidés. On a retrouvé les traces de deux paires de chaussures, une empreinte de gant, et des miettes de chips sur la table basse.

Mais pas de burgers.

L’enquête et le scandale

Ce n’est que deux jours plus tard, lorsque Julien a déposé plainte au commissariat de Toulouse, que la vérité a émergé. Le responsable de l’accueil, stupéfait par son récit, a immédiatement contacté la direction régionale. Un audit a été lancé. Les bandes sonores des appels de la soirée du 10 avril ont été analysées.

Et là, le choc.

L’enregistrement est surréaliste. Entre la panique étouffée de Julien et la voix joviale de l’opérateur, on perçoit clairement le mot cheeseburger, puis une hésitation, suivie d’un avec frites ou nuggets ?. L’enquête interne a rapidement identifié l’opérateur concerné : Un contractuel en intérim, en poste depuis trois semaines, mal formé, et surtout… épuisé après 11 heures de service.

Il a été suspendu immédiatement. Un conseil de discipline a été convoqué. Les syndicats dénoncent une surcharge de travail chronique et une direction qui ferme les yeux sur des “bricolages” techniques inadmissibles. L’opérateur, selon ses propres mots, ne se souvenait même pas d’avoir passé cet appel”. Il a cru rêver.

Un fait divers qui ébranle la confiance

Sur les réseaux sociaux, l’affaire a fait l’effet d’un séisme. Le mot-dièse #Cheeseburglar est vite devenu viral. Entre les moqueries, les montages d’un McDo en feu et les messages de soutien à Julien, la polémique a grossi. Les syndicats policiers réclament une refonte du système d’appel d’urgence. Les politiques s’en mêlent.

Le préfet de région s’est exprimé publiquement, qualifiant l’incident de grave dysfonctionnement aux conséquences potentiellement dramatiques. La ministre de l’Intérieur a demandé un rapport complet sous 15 jours.

Julien, lui, n’a toujours pas récupéré ses biens. Il dort chez un ami, et hésite à retourner dans son appartement. Il sursaute à chaque bruit. Il ne décroche plus son téléphone sans trembler.

« Ce soir-là, je croyais mourir. Et quelqu’un m’a demandé si je voulais des nuggets… C’est presque drôle. Sauf que moi, je ne ris pas. »

Et maintenant ?

L’administration a promis de revoir la gestion des appels d’urgence. Un audit technique complet est en cours sur l’ensemble des centres régionaux. Quant à Julien, il a été reçu par la maire de Saint-Orens et s’est vu proposer un accompagnement psychologique.

Il envisage désormais de porter plainte contre l’État pour non-assistance à personne en danger. Une première, dans un cas aussi absurde.

Et pendant ce temps, dans une salle obscure d’un centre d’appel, un terminal d’ordinateur conserve la trace d’une commande jamais envoyée.

Un cheeseburger. Des frites. Et un homme seul dans la nuit.

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