Entre barbarie, humiliation et violence, l’affaire du calvaire d’un homme de 83 ans en Gironde soulève une vague d’émotion. Récit complet.

Gironde : Deux Algériens condamnés pour avoir infligé un « calvaire » à un homme de 83 ans, déshabillé, humilié et violenté

CHOC

Il s’appelait Marcel.

À 83 ans, ce vieil homme aux mains calleuses et aux yeux d’un bleu pâle portait sur lui les traces du labeur et du temps. Ancien artisan, il vivait seul depuis la mort de sa femme, dans une petite maison en pierre perdue au cœur de la Gironde, entre vignes silencieuses et chemins oubliés.

Chaque matin, à l’heure où la brume s’effilochait sur les collines, il sortait sur le perron, une tasse ébréchée de chicorée entre les mains. Il n’attendait plus grand-chose de la vie, sinon le chant des mésanges et la visite sporadique d’un voisin compatissant. Jusqu’à ce jour maudit d’octobre 2023, où deux silhouettes inconnues s’invitèrent dans son existence.

L’irruption du mal dans la routine d’un vieil homme

Ils s’appelaient Farès et Adel. Originaires d’Algérie, fraîchement arrivés en France, ils vivaient de petits trafics et de combines dans l’agglomération bordelaise. Rien ne semblait prédestiner leur chemin à croiser celui de Marcel. Et pourtant.

Ce jour-là, ils avaient pris la route en quête d’une maison isolée, selon leurs propres mots, pour « trouver un vieux, c’est plus facile, ça parle pas, ça dénonce pas« .

Leur voiture, une Peugeot 206 grise volée quelques jours plus tôt, s’engagea sur le chemin de terre qui menait chez Marcel. Ils n’avaient pas de plan. Juste la rage, la bêtise, et cette certitude effroyable d’être au-dessus des lois.

Le calvaire de Marcel

Il était environ 16 heures. Marcel préparait une soupe aux poireaux. Le bruit sec d’un coup à la porte le fit sursauter. Lorsqu’il ouvrit, il tomba nez à nez avec deux jeunes hommes. L’un souriait, l’autre semblait nerveux.

« Bonjour papy, t’as pas un peu d’eau ? », demanda le plus jeune. Avant même qu’il n’ait pu répondre, ils étaient déjà entrés.

Ce qui suivit ne dura qu’une trentaine de minutes. Mais pour Marcel, ce fut une éternité. Ils l’ont fait asseoir de force sur son fauteuil. L’un des deux, hilare, lui arracha son pull en le traitant de « vieux dégueulasse« . Ils le déshabillèrent complètement, sans aucune raison. Puis ils l’humilièrent. Le firent se lever, tourner, s’asseoir, le filmaient avec un téléphone.

Quand il osa protester, la violence s’abattit. Une gifle d’abord. Puis des coups au ventre. Un crachat au visage. Adel lui renversa son bol de soupe sur la tête, pendant que Farès lui hurlait qu’il « n’était plus rien dans ce pays« .

Ils fouillèrent les tiroirs, volèrent 50 euros, un vieux téléphone, un flacon de parfum. Mais le pire, ce n’était pas le vol.

C’était l’intention.

La fuite, l’enquête, le procès

Les deux agresseurs repartirent en laissant Marcel nu, étendu sur le sol de sa cuisine. Son visage saignait. Il ne pleura pas. Il appela les secours avec un vieux téléphone à clapet retrouvé sous son lit.

L’affaire fit peu de bruit au départ. Une simple ligne dans un journal local. Mais les gendarmes de Libourne, émus par la dignité du vieil homme et choqués par les faits, menèrent une enquête rapide. Grâce à la vidéosurveillance d’un commerce de la commune voisine et à l’empreinte partielle laissée sur un verre, Farès et Adel furent identifiés. Arrêtés trois semaines plus tard à Bordeaux.

Lors du procès, qui s’est tenu en mars 2025, la présidente du tribunal de Bordeaux n’a pas masqué son indignation.

« Ce que vous avez fait n’est pas un simple vol. C’est une torture. Une volonté assumée d’humilier. »

Adel, 20 ans, baissait les yeux. Farès, 23 ans, affichait une arrogance froide.

Le parquet demanda cinq ans ferme. La défense tenta de plaider une « jeunesse désorientée« , un « manque de repères culturels« , mais rien n’y fit.

Le tribunal suivit en grande partie les réquisitions : Trois ans de prison ferme pour Farès, deux ans pour Adel, avec mandat de dépôt immédiat.

Les suites pour Marcel, et pour la société

Marcel a quitté sa maison. Il vit désormais dans une résidence seniors à Langon. Il ne sort plus beaucoup. Mais il lit les journaux, et garde dans un tiroir la lettre manuscrite d’un enfant de 9 ans qui a appris son histoire à l’école :

« Cher Monsieur, je vous trouve courageux. Moi aussi j’ai un papi, et je voudrais que plus personne ne fasse de mal aux papis. »

Ce fait divers n’est pas un cas isolé. En France, en 2024, les violences contre les personnes âgées ont augmenté de 12%. Vols, humiliations, agressions.

La solitude, le sentiment d’impunité, le délitement du lien social créent des situations propices à la barbarie.

Mais ce que cette affaire révèle, au-delà des chiffres, c’est la faille humaine. Comment deux jeunes hommes peuvent-ils franchir la ligne de la cruauté gratuite ? Qu’avons-nous raté, en tant que société, pour que cela paraisse possible ?

Un symbole dérangeant

Le fait que les deux agresseurs soient étrangers n’est pas anodin dans le débat public. Plusieurs élus ont évoqué l’affaire pour dénoncer des dérives migratoires. D’autres appellent à la prudence, à ne pas amalgamer.

Mais au fond, ce que cette affaire met en lumière, c’est une vérité nue : Dans la France rurale, silencieuse, isolée, des personnes âgées vivent dans la peur. Elles sont les cibles idéales d’une violence sans visage. Et parfois, comme Marcel, elles tombent.

Et maintenant ?

Marcel ne réclame pas vengeance. Il réclame qu’on n’oublie pas.

Il dit simplement : « J’ai pardonné, mais je ne veux pas qu’on m’efface. »

Et quelque part dans une salle d’audience, entre un juge las et une greffière attentive, résonne encore cette phrase prononcée par le procureur :

« Quand on s’en prend à nos anciens, c’est à notre humanité que l’on porte atteinte. »

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