Éléonore : « Quand j’ai appris que 4,3 millions d’étrangers vivaient légalement en France en 2024, je me suis demandé : S’agit-il d’une simple évolution statistique… ou bien d’un bouleversement silencieux qui redessine la France que nous connaissions ? »
Le soir où tout a changé
Éléonore, la cinquantaine discrète et cultivée, feuilletait son journal en ligne dans son salon baigné par la lumière douce d’un hiver tardif. Une ligne la figea : « 4 331 326 étrangers en situation régulière recensés en France fin 2024 ».
Elle relut, incrédule. Non, ce n’était pas une coquille. Pas un chiffre extrapolé ni un titre alarmiste. Mais bien un dossier complet du ministère de l’Intérieur, relayé par plusieurs médias, y compris Valeurs Actuelles. Le document était officiel, les chiffres incontestables.
Une question s’imposa à elle, d’abord en silence, puis à voix haute : « Comment en est-on arrivé là ? »
L’explosion d’une France plurielle
La donnée est brute, mais éclatante : 4,3 millions d’étrangers disposant d’un titre de séjour valide ou d’un document provisoire au 31 décembre 2024, soit 3,9 % de plus qu’en 2023.
Dans le détail :
- 4 202 672 en métropole (+4,0 %),
- 128 887 dans les départements d’outre-mer (+1,2 %),
- et -1,1 % dans les collectivités d’outre-mer, marquant un recul discret.
La France, territoire d’accueil, territoire d’attractivité, territoire de transit parfois, voit son visage changer.
Derrière les chiffres, les visages
Ils s’appellent Fatou, Leïla, Reda, Abdul, Erika, ils viennent du Maghreb, de l’Afrique subsaharienne, du Moyen-Orient, ou encore du Royaume-Uni, post-Brexit oblige. Ils sont étudiants, travailleurs, réfugiés, conjoints de Français, et parfois en quête d’un avenir plus sûr.
🟨 Les nationalités les plus présentes :
- Algérie : 649 991 titres de séjour (+0,5 %)
- Maroc : 617 053 (+2,2 %)
- Tunisie : 304 287 (+4,9 %)
- Royaume-Uni : 169 991 (+2,2 %)
- Côte d’Ivoire : +9,1 %
- Sénégal : +5,7 %
- République Démocratique du Congo : +6,2 %
Un paysage international qui montre que les vagues migratoires ne cessent de se diversifier.
Les motifs de séjour : Du rêve d’étude à la nécessité humanitaire
En 2024, 343 024 premiers titres de séjour ont été délivrés. Le chiffre reste relativement stable, mais certains motifs explosent :
- 🟩 Motif humanitaire : +13,4 %
- 🟩 Motif économique : +8,1 %
- 🟩 Études : 110 633 primo-délivrances
Le renouvellement de titres augmente lui aussi, notamment dans les catégories « étudiant » et « travail« . À l’inverse, les titres familiaux baissent de 4,4 %.
Derrière ces données se cachent des parcours singuliers : Une bourse Erasmus pour une étudiante tunisienne, un contrat de travail dans la restauration pour un jeune homme du Sénégal, une protection pour une famille syrienne fuyant la guerre.
L’Île-de-France, point névralgique
Éléonore poursuit sa lecture. Une carte thermique s’affiche sur l’écran. Les zones les plus « rouges » s’imposent sans appel.
En tête :
- Paris,
- Seine-Saint-Denis,
- Val-de-Marne.
Et surtout :
🔴 Seine-Saint-Denis avec un taux d’étrangers de 27,0 % (contre 7,9 % de moyenne nationale).
Là, dans ce département, plus d’une personne sur quatre est étrangère en situation régulière. Éléonore frémit. Elle imagine ces villes, ces écoles, ces marchés, ces maternités où coexistent langues, croyances, mémoires et tensions parfois.
L’asile, l’autre visage de l’immigration
Le rapport évoque aussi l’asile. Une autre réalité, souvent ignorée, parfois confondue.
En 2024 :
- 153 715 demandes d’asile enregistrées à l’OFPRA (+7,8 %)
- 129 909 premières demandes (–10,5 %)
- Taux de protection OFPRA : 38,8 % (+5,9 points)
- Taux total OFPRA + CNDA : 49,4 %
Près d’un demandeur sur deux est donc protégé, preuve que les motifs d’asile sont jugés fondés. Le reste, souvent, sombre dans la clandestinité ou l’expulsion, sans bruit médiatique.
Un modèle en tension
En France, parler d’immigration, c’est toujours flirter avec les passions. Pour certains, ces chiffres sont un signal d’ouverture et d’humanité. Pour d’autres, un signe de perte de contrôle, un modèle à bout de souffle.
Éléonore ne tranche pas. Elle interroge. Elle veut comprendre. Comment le système absorbe-t-il cette évolution ?
Santé, logement, école, emploi : Chaque titre de séjour valide entraîne une demande d’intégration dans les rouages d’un État-providence déjà éprouvé.
L’envers de la carte
Ce que peu disent, c’est que les chiffres pourraient être encore plus élevés, si l’on comptait :
- Les sans-papiers,
- Les demandeurs d’asile déboutés toujours présents,
- Les étrangers européens, qui ne sont pas soumis aux titres de séjour,
- Les mineurs nés en France de parents étrangers non naturalisés.
On estime que la présence étrangère réelle pourrait dépasser 6 à 7 millions de personnes en France. Mais nul ne le sait avec certitude. Et cela, Éléonore le sait maintenant, fait partie du trouble.
Une France recomposée
Il est 1h12 du matin. Éléonore éteint son écran. Elle n’a pas peur. Mais elle est troublée. Jamais elle n’aurait imaginé que près d’un Français sur 15 ne soit pas… Français.
Et pourtant, c’est une réalité.
Pas une invasion. Pas une fiction. Mais une transformation lente, profonde, irréversible.
À la croisée des chemins
À l’heure où certains réclament un « frein« , d’autres un « pont« , la France marche en funambule entre ses valeurs républicaines, ses impératifs sociaux et les défis géopolitiques mondiaux.
Les 4,3 millions d’étrangers réguliers ne sont ni un problème, ni une solution miracle. Ils sont un fait, un élément constitutif de la France d’aujourd’hui.
La question désormais n’est plus « Qui est là ? » mais « Que fait-on ensemble ? »