« Ce matin-là, Inès a cligné des yeux devant son écran : “Suis-je bien en train de voir une publicité… dans mes statuts WhatsApp ? Est-ce le début de la fin ou simplement l’évolution logique d’une appli devenue trop populaire pour rester gratuite ?” »
Inès n’avait encore rien remarqué. Ce matin-là, dans son petit appartement de Lyon, elle avait comme chaque jour lancé WhatsApp pour consulter les derniers statuts de ses amies. Des paysages de vacances, un selfie au réveil, quelques citations inspirantes. Puis, sans prévenir, un encart animé, fluide, à peine différent du reste, avait surgi. Une publicité. Elle avait cligné des yeux. Etait-ce réel ? WhatsApp diffusait-il désormais des pubs dans son fil personnel ? La réponse, implacable, se confirma rapidement : Oui, Meta avait officiellement lancé les publicités dans l’application la plus utilisée du monde.
Le dernier bastion sans pub est tombé
Pendant des années, Meta avait résisté. Contrairement à Facebook ou Instagram, WhatsApp se targuait d’être une messagerie pure, sans intrusion commerciale. L’idée de Jan Koum et Brian Acton, ses fondateurs, était simple : « Pas de pubs. Pas de distractions. Juste des messages. » Mais depuis son rachat par Facebook en 2014, l’étau s’était lentement resserré. En 2025, après des années d’expérimentations discrètes, Meta franchit le pas.
La première phase de déploiement concerne l’onglet “Actus”, où apparaissent les statuts, les chaînes, et bientôt… des annonces publicitaires intercalées, sous forme de stories sponsorisées.
Comment ça fonctionne ? Ce qui change pour l’utilisateur
Inès, comme des millions d’utilisateurs, s’interroge : Va-t-elle être submergée par des pubs intrusives ? Va-t-on utiliser ses messages privés pour la cibler ?
Meta assure que la confidentialité reste une priorité :
- Les chats privés, appels vocaux et vidéos resteront chiffrés de bout en bout.
- Les publicités sont uniquement visibles dans l’onglet “Actus”.
- Le ciblage publicitaire s’appuie uniquement sur la localisation, la langue et les chaînes suivies. Pas sur les messages ou contacts.
Et surtout, Meta n’a pas le droit de partager les numéros de téléphone avec les annonceurs. Une mesure saluée par les défenseurs de la vie privée, bien que certains experts restent prudents.
Un modèle économique qui évolue
Mais pourquoi ce changement maintenant ?
Meta veut rentabiliser WhatsApp, fort de plus de 2 milliards d’utilisateurs dans le monde, sans pour autant le rendre payant. Trois leviers de monétisation sont annoncés :
- Les publicités entre les statuts, identiques au format « story » qu’on retrouve sur Instagram.
- Les chaînes sponsorisées : Les marques pourront désormais payer pour apparaître dans l’annuaire public de chaînes, visible dans l’onglet Actus.
- Les abonnements payants aux chaînes : Créateurs, artistes, sportifs ou journalistes peuvent proposer du contenu exclusif contre une souscription mensuelle.
Meta pourrait ainsi prélever une commission de 10 % sur ces abonnements, suivant un modèle similaire à Telegram Premium.
La bascule stratégique de Meta
Cette évolution n’est pas qu’esthétique. Elle est profondément stratégique. Meta ne peut plus se permettre d’avoir une application aussi populaire sans retour sur investissement direct. Déjà en 2024, le groupe avait commencé à tester l’idée de faire payer certaines fonctions business aux entreprises. Cette fois, c’est l’univers personnel de l’utilisateur qui est concerné — avec une promesse : Respecter la frontière entre vie privée et engagement public.
Réactions mitigées : entre agacement et résignation
Du côté des utilisateurs, les réactions sont partagées.
— « Encore une appli qui vend son âme… », râle Jules sur X.
— « Franchement, tant que mes messages restent privés, je peux tolérer une pub de temps en temps », relativise Chloé.
Certains regrettent l’époque où WhatsApp était un outil de communication “pur”. D’autres s’inquiètent d’une possible pente glissante vers une publicité omniprésente, comme sur Facebook.
Et demain ? Vers une WhatsApp à deux vitesses ?
Une rumeur enfle déjà : WhatsApp pourrait un jour proposer une version payante sans publicité, à l’image de YouTube Premium. Ce modèle, testé avec succès par d’autres plateformes, permettrait à Meta de satisfaire les utilisateurs les plus réticents… tout en assurant une rentabilité sans dépendre uniquement des annonceurs.
Inès, elle, envisage de s’abonner à la chaîne d’un journaliste indépendant qu’elle adore. Pour elle, WhatsApp devient un espace d’info autant que de communication. Et tant que ses messages à son frère malade ou à sa meilleure amie restent à l’abri, elle est prête à accepter cette évolution.
Un fragile équilibre entre confidentialité et rentabilité
WhatsApp ne sera plus jamais exactement le même. Avec l’arrivée des publicités dans les statuts et les chaînes, Meta transforme l’expérience sans (encore) toucher à l’essentiel : La confidentialité des messages. Mais cette ligne rouge tiendra-t-elle éternellement ?