Clara : « Ce matin, en ouvrant les volets, j’ai découvert un nid de pigeon sur mon balcon… Deux œufs y reposaient, paisibles. Est-ce que je peux le déplacer sans risquer une amende ? »
Un matin comme les autres… ou presque
Clara, 34 ans, habite le quatrième étage d’un immeuble cossu du 12e arrondissement de Paris. Ce matin-là, elle ouvre en bâillant la baie vitrée de son petit balcon fleuri, là où elle cultive ses géraniums rouges et son plant de basilic. Mais ce n’est pas l’odeur de la terre humide qui la surprend en premier. C’est le calme. Puis ce « roucoulement ». Et enfin, une découverte inattendue : Un nid, soigneusement tissé de brindilles, de feuilles et de plastique. Deux pigeons ramiers l’ont adopté. En leur cœur : Deux œufs.
Elle se fige. Est-ce dangereux ? Sale ? Peut-elle le déplacer ? Le balayer ? Le jeter à la poubelle ?
Un réflexe que beaucoup de Français ont… et qui peut coûter très cher
Clara, comme de nombreux riverains, envisage d’abord de nettoyer son balcon à la hâte. Mais un ami lui envoie un lien d’article : “Déplacer ou détruire un nid de pigeon sur votre balcon peut vous coûter cher.” Un titre choc. En lisant, elle tombe de haut. Elle découvre que même les pigeons – souvent considérés comme nuisibles – sont en réalité protégés par la loi lorsqu’ils construisent leur nid.
L’article L.411-1 du Code de l’environnement est clair : Il est interdit de détruire, déplacer, ou perturber volontairement les oiseaux, leurs œufs ou leurs nids pendant la période de reproduction. Toute infraction est passible de jusqu’à 150 000 euros d’amende et 3 ans de prison.
Pourquoi une telle sévérité pour… un pigeon ?
Les pigeons, malgré leur réputation d’oiseaux envahissants, appartiennent à une espèce protégée comme la majorité des oiseaux nichant en France. La loi ne fait pas de distinction entre un merle, une mésange ou un pigeon ramier. Leur nid, leurs œufs et leurs oisillons sont intouchables.
Ce dispositif législatif n’a rien d’anecdotique. Il vise à protéger la biodiversité, en particulier pendant les périodes critiques de reproduction. Même sur un balcon privé, l’interdiction s’applique.
Les erreurs à éviter : Ce que Clara aurait pu faire de grave
En voulant « faire le ménage », Clara aurait pu :
- jeter le nid à la poubelle (délit),
- asperger les œufs d’eau ou de produits chimiques (délit),
- tenter de chasser les pigeons en les effrayant ou en bloquant l’accès (délit),
- appeler un dépigeonneur non agréé pour intervenir sans autorisation (délit).
Elle aurait pu, en résumé, s’exposer à des sanctions très lourdes sans même le savoir.
Les seules options légales pour réagir à la présence d’un nid de pigeon
➡️ Observer et attendre : La solution recommandée par la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) est de laisser la nature suivre son cours. Les pigeons ne resteront pas éternellement. Une fois les oisillons envolés, le nid pourra être retiré en dehors de la période de reproduction, généralement entre septembre et janvier.
➡️ Faire appel à un professionnel agréé : Pour les cas complexes, ou en présence de maladies (pigeons morts, fientes abondantes), il est possible de contacter une société spécialisée disposant des autorisations nécessaires. Ces entreprises interviennent dans le respect des normes environnementales.
➡️ Prévenir la nidification à l’avenir : Une fois le nid vide, on peut poser des pics anti-pigeons, installer du fil tendu, ou placer des dispositifs dissuasifs visuels (rapaces factices, bandes réfléchissantes). Le tout, sans jamais nuire directement aux oiseaux.
Et si j’enfreins la loi ? Quelques exemples concrets de condamnation
Plusieurs cas ont déjà été rapportés par les médias ou les associations :
- Un particulier à Marseille, excédé par les fientes, a été verbalisé pour avoir jeté un nid contenant trois œufs. Il a écopé de 6 mois de prison avec sursis et 1 500 € d’amende.
- À Lyon, une copropriété a dû régler une procédure après avoir fait intervenir une société illégale de dépigeonnage sans autorisation. Résultat : 5 000 € d’amende et obligation de remettre les lieux en conformité.
- À Paris, un syndicat de copropriété a été mis en demeure par la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement) après destruction de plusieurs nids pendant les travaux de ravalement.
Vivre avec les pigeons, ou au moins les comprendre
Clara, désormais bien informée, a décidé de laisser les œufs éclore. Elle a même nommé les deux pigeons : Alfred et Joséphine. Chaque jour, elle observe leur ballet discret et nourrit une forme d’attachement inattendu.
Au lieu de risquer une lourde sanction, elle a choisi la cohabitation. Une leçon de patience, de droit, mais aussi d’écologie en milieu urbain.