Entre convivialité et manipulation : à Bagnols-sur-Cèze, des trafiquants cherchent à neutraliser les tensions par des gestes généreux, selon Valeurs Actuelles.

Gard : Les dealers achètent la paix sociale avec argent, fêtes et services aux habitants

SOCIETE

Dans les rues tranquilles de Bagnols-sur-Cèze, petite ville du Gard, les habitants ont vu apparaître ces derniers mois un phénomène pour le moins inattendu. Là où l’on pourrait s’attendre à ce que les trafiquants de drogue cherchent à intimider pour protéger leurs affaires, c’est une toute autre stratégie qui semble s’installer : Acheter la paix sociale.

Selon les informations rapportées par Valeurs Actuelles, certains dealers locaux ont décidé de se rapprocher de la population, non pas par la menace, mais par… la générosité apparente. Des billets glissés dans une main discrète, des fêtes de quartier financées, des services de bricolage ou de courses offerts aux riverains. L’objectif ? Faire en sorte que le voisinage ferme les yeux sur les allées et venues suspectes et que la tranquillité règne, au moins en façade.

Des “services” au lieu des conflits

Bruno Bartocetti, représentant du syndicat Unité-Police zone sud, explique que cette pratique n’a rien d’anodin : Elle rappelle les méthodes utilisées par certains cartels en Amérique latine, où l’argent et les “bons gestes” servent de ciment social entre les trafiquants et la population. En se rendant indispensables ou aimés, ces dealers espèrent éviter les dénonciations et maintenir un climat de calme artificiel dans leur secteur.

Les prospectus distribués dans certaines boîtes aux lettres en témoignent : On y trouve la promesse de menus services du quotidien, d’un coup de main pour réparer un volet, d’un aller-retour en voiture pour les courses. Un contact “amical” qui cache une réalité bien plus sombre : Celle d’un quartier où la présence policière devient plus compliquée à justifier lorsque les habitants eux-mêmes ne se plaignent plus.

Une situation inquiétante pour les autorités

Pour l’Office anti-stupéfiants (Ofast), cette tendance est particulièrement préoccupante. Fin juin 2025, la France comptait plus de 2 700 points de deal recensés sur son territoire. Et dans certains cas, l’implantation des trafics ne passe plus par la peur, mais par la conquête subtile des cœurs et des esprits.

La difficulté pour les forces de l’ordre est double : Non seulement la population devient plus réticente à signaler les activités illégales, mais les trafiquants eux-mêmes acquièrent une forme de légitimité sociale, alimentée par la reconnaissance de leurs “bons gestes”.

Un mirage de tranquillité

Derrière les rires des fêtes de quartier et les gestes de service, c’est une dynamique complexe qui se met en place. Les dealers n’achètent pas seulement du silence, ils achètent du temps, de l’influence et un réseau de protection informel. Les habitants, parfois séduits par ces attentions, se retrouvent malgré eux pris dans une toile où la gratitude côtoie l’omerta.

Et si, à court terme, cette stratégie peut apaiser les tensions visibles, à long terme, elle renforce la présence du narcotrafic dans la ville. Car une fois la confiance installée, la frontière entre “service rendu” et “service exigé” devient floue.

À Bagnols-sur-Cèze, cette réalité intrigue autant qu’elle inquiète. Pour les autorités, la lutte contre ce type de stratégie “douce” risque d’être bien plus complexe que celle menée contre la violence frontale. Et pour les habitants, la question demeure : La tranquillité offerte aujourd’hui ne se paiera-t-elle pas très cher demain ?

Laisser un commentaire