« Sandrine, habituée du village naturiste du Cap d’Agde, n’en revient toujours pas : “Comment une simple balade à l’arrière de la Baie des Cochons a-t-elle pu nous coûter 135 euros ? Que s’est-il passé pour que ce lieu de liberté devienne une zone à haut risque d’amende ?” »
À l’arrière de la Baie des Cochons, dans ce recoin du Cap d’Agde qui fleure encore bon la liberté nudiste, un vent beaucoup moins doux s’est levé ces derniers jours. Il ne souffle pas du large, non. Il vient du sol, du bitume et des herbes hautes, là où s’aventurent les promeneurs du matin, les couples naturistes curieux ou les fêtards désinhibés. Là où, soudainement, les amendes de 135 euros tombent comme la pluie sur une verrière d’été.
C’était un matin comme les autres. Sandrine, venue avec son compagnon depuis la Drôme, avait garé son van non loin de la zone du Bagnas, juste derrière la célèbre Baie des Cochons. Un coin tranquille, sans panneau visible, à l’abri du tumulte, presque hors du temps. Elle ignorait que ce petit havre serait, quelques heures plus tard, le théâtre d’un contrôle aussi discret que redoutable.
Le Cap d’Agde naturiste : Entre mythe et surveillance
Ceux qui connaissent bien le village naturiste du Cap d’Agde le savent : Cet espace unique en France attire depuis des décennies des milliers de visiteurs venus du monde entier. Fondé dans les années 1970, ce quartier naturiste situé à l’écart du centre-ville est un véritable microcosme, un monde à part, où les codes sont inversés, où la nudité n’est pas une provocation mais une norme, où chacun peut marcher librement, sans artifice, entre le port, les commerces et les plages.
Mais derrière cette façade de tolérance assumée, le cadre est strictement encadré par une réglementation. Et depuis quelques années, des dérives ont attiré l’attention des autorités locales : Échangisme affiché, comportements sexuels sur les dunes, trafic de stupéfiants, stationnements sauvages… autant d’abus qui ont progressivement altéré l’image originelle du naturisme familial.
En 2025, le couperet administratif tombe plus vite que les grains de sable entre les orteils. Et les vacanciers imprudents qui pensaient faire une simple pause dans une zone isolée découvrent désormais que l’arrière de la Baie des Cochons est devenu un terrain ultra surveillé.
135 € pour une pause, un pas de trop ou un stationnement mal placé
Les témoignages affluent sur les réseaux sociaux et dans les colonnes de Midi Libre. Plusieurs touristes ou habitués du site ont rapporté avoir été verbalisés par la gendarmerie ou la police municipale, sans réelle sommation. Le montant ? Toujours le même : 135 euros.
L’objet précis des amendes n’est pas toujours clair. Stationnement sur des zones interdites, entrée dans une zone protégée du Bagnas, non-paiement du droit d’accès au village naturiste, ou simplement présence sur un site réglementé sans badge officiel : Les causes sont multiples, mais la sanction est unique et sévère.
Sandrine, elle, n’avait vu aucun panneau. « Nous sommes arrivés très tôt, il n’y avait personne, pas même un gardien. On voulait juste aller à la plage en évitant la foule. » Quand elle est revenue à son véhicule, un petit papillon blanc attendait sur son pare-brise. Une contravention à 135 euros, sans autre mot.
Le village du Bagnas : Entre liberté nue et zonage strict
Ce que peu de vacanciers savent, c’est que l’ensemble du village naturiste est situé à proximité immédiate de la Réserve naturelle nationale du Bagnas, un site protégé où la circulation et le stationnement sont strictement encadrés. La frontière entre l’espace naturiste autorisé et la zone interdite est parfois floue sur le terrain. Et dans cet entre-deux, des agents assermentés patrouillent discrètement.
Ce sont eux qui, appuyés par la gendarmerie, surveillent désormais les moindres allées et venues à l’arrière de la Baie des Cochons. Les véhicules sans autorisation, les promeneurs hors badge, les nudistes qui s’aventurent dans les mauvaises dunes… Tous peuvent faire l’objet d’une verbalisation immédiate.
Selon Midi Libre, ce sont des dizaines de contraventions qui ont été dressées en quelques jours seulement. Et certaines voix locales affirment que cette vague de sanctions pourrait s’amplifier dans les semaines à venir, l’été étant la haute saison des débordements.
Entre colère, incompréhension et résignation
Sur les forums naturistes et les pages Facebook locales, la grogne monte. Certains dénoncent une forme de « répression déguisée », d’autres évoquent une volonté politique de limiter les excès libertins. Car la Baie des Cochons, malgré son nom qui prête à sourire, est aussi connue pour être un haut lieu du libertinage balnéaire. Les autorités ont, par le passé, tenté de « nettoyer » ce secteur pour restaurer une image plus respectable du site.
Mais pour les visiteurs de bonne foi, ceux qui veulent simplement vivre une expérience naturiste paisible, ces amendes salées paraissent injustes. « Pourquoi ne pas mettre de panneau ? Pourquoi ne pas prévenir les touristes ? » demande Julien, venu de Belgique avec sa compagne.
Une image écornée pour un lieu mythique
En quelques jours, la rumeur s’est répandue : « Attention aux 135 € à Cap d’Agde ». Une phrase chuchotée dans les campings, murmurée dans les clubs, redoutée sur les groupes de discussion. Et ce simple chiffre commence à peser sur l’ambiance estivale.
Le village naturiste, autrefois synonyme de liberté et de tolérance, devient peu à peu le symbole d’un naturisme sous surveillance, où chaque pas peut coûter cher, où chaque stationnement peut se transformer en contravention.
Ce que dit (ou ne dit pas) la mairie
Contactée par Midi Libre, la mairie d’Agde n’a pas souhaité commenter directement ces verbalisations. Mais selon plusieurs sources internes, les contrôles devraient continuer tout l’été, notamment dans les zones jugées sensibles du Bagnas.
La volonté serait double : Rétablir l’ordre et la légalité, tout en dissuadant les comportements les plus extrêmes qui nuisent à l’image du Cap d’Agde naturiste.
Le prix de la liberté nue
À Cap d’Agde, le naturisme a toujours été un équilibre fragile entre liberté individuelle, respect des autres et règles collectives. Mais en 2025, cette balance semble pencher dangereusement du côté de la sanction. 135 euros, c’est le nouveau prix de l’imprudence, ou d’une ignorance parfois involontaire.
Et pour ceux qui, comme Sandrine, avaient simplement envie de marcher pieds nus vers la mer, cette amende a un goût amer. Non pas celui du sel sur la peau, mais celui d’un été un peu trop policé, d’une liberté nue… désormais surveillée.