De Gaulle refuse la retraite de Président : un exemple de probité oublié

Charles de Gaulle : Le Président qui payait lui-même ses factures et refusa la retraite de Chef d’État

HISTOIRE

Il est des figures historiques dont le souvenir dépasse les générations. Charles de Gaulle, chef de la France libre en 1940, fondateur de la Ve République et Président de la République française de 1959 à 1969, fait partie de ces rares hommes d’État qui continuent d’incarner une certaine idée de l’honneur. Mais au-delà de ses grands discours et de ses décisions politiques, une facette méconnue de sa personnalité mérite d’être rappelée : Sa rigueur financière et morale, sa manière de distinguer scrupuleusement ses affaires privées des ressources publiques.

Loin du faste, des privilèges et des avantages qui accompagnent généralement la fonction suprême, De Gaulle s’imposa une discipline rare, presque inconcevable pour un chef d’État moderne. Non seulement il payait de sa poche ses factures personnelles à l’Élysée, mais il alla jusqu’à refuser la retraite prévue pour les anciens Présidents de la République, préférant vivre modestement avec sa pension de militaire.

Un Président qui payait son électricité et ses timbres

Lorsqu’il s’installe à l’Élysée en janvier 1959, après avoir été porté au pouvoir dans le contexte de la crise algérienne, De Gaulle surprend ses collaborateurs. Alors que beaucoup auraient profité sans réserve des moyens mis à disposition par l’État, il décide au contraire de séparer strictement ses dépenses personnelles de celles de la Nation.

Ainsi, il règle lui-même ses factures d’électricité pour les appartements privés qu’il occupe au sein du palais présidentiel. Les conversations téléphoniques passées dans un cadre strictement familial ou amical ? Payées également de sa poche. Même les timbres qu’il collait sur ses lettres personnelles n’étaient pas prélevés sur les fonds publics.

Cette rigueur allait jusqu’au détail. Des témoignages d’anciens collaborateurs racontent que De Gaulle veillait attentivement à ce que ses dépenses privées ne soient jamais confondues avec celles de la présidence. On rapporte même qu’il avait instauré un système clair avec son secrétariat pour que chaque appel ou courrier de nature personnelle soit soigneusement comptabilisé et refacturé.

Le refus catégorique de la retraite présidentielle

Mais c’est surtout après sa démission, en avril 1969, que son sens de l’honneur se manifesta de façon éclatante. En tant qu’ancien Président de la République, De Gaulle avait droit à une retraite spéciale de Chef d’État, confortable et destinée à assurer une sécurité financière à vie. Pourtant, il la refusa catégoriquement.

Son argument était simple : Il avait déjà une pension militaire, celle de général de brigade à titre définitif, et elle lui suffisait amplement. L’argent de l’État devait, selon lui, être consacré à d’autres priorités que de financer son confort personnel. Une décision qui tranche radicalement avec ce que la France a connu par la suite, où les anciens présidents ont tous bénéficié des avantages financiers et matériels liés à leur statut.

La vie simple de De Gaulle à La Boisserie

Après sa démission, Charles de Gaulle se retire dans sa maison familiale de La Boisserie, à Colombey-les-Deux-Églises, en Haute-Marne. Là encore, loin du prestige des palais officiels, il adopte un mode de vie simple.

À La Boisserie, il retrouve la rigueur militaire qui ne l’a jamais quitté. Pas de luxe ostentatoire, pas d’entourage mondain, seulement sa femme Yvonne, quelques proches, et une discipline quotidienne marquée par la lecture, l’écriture de ses Mémoires et des promenades dans le parc.

Ses revenus étaient modestes, mais il s’en contentait. La pension de général ne lui permettait pas de mener grand train, mais elle lui suffisait pour vivre dignement. Cette austérité volontaire renforça encore l’image d’un homme fidèle à ses principes.

Des anecdotes révélatrices de son caractère

Plusieurs anecdotes illustrent ce rapport singulier de De Gaulle à l’argent et aux privilèges.

  • À l’Élysée, il aurait insisté pour que les fleurs personnelles commandées par Yvonne de Gaulle soient réglées sur leurs propres deniers et non sur les fonds de la présidence.
  • Lors de ses voyages officiels, il refusait systématiquement les « cadeaux excessifs » qu’on pouvait lui offrir. Ceux qu’il ne pouvait décliner étaient remis à l’État, et non intégrés à son patrimoine personnel.
  • On raconte également qu’il avait rappelé à un proche collaborateur que « les caisses de l’État ne sont pas celles du Général« . Une phrase devenue emblématique de sa vision de la fonction.

Un contraste saisissant avec ses successeurs

En relisant ces épisodes de la vie de De Gaulle, le contraste avec les pratiques qui suivirent est saisissant. Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, François Hollande et Emmanuel Macron ont tous bénéficié, sous des formes diverses, d’avantages liés à leur fonction ou à leur statut d’ancien président : Logements de fonction, gardes rapprochées, véhicules officiels, retraites cumulées avec d’autres indemnités.

Ces privilèges sont souvent critiqués par l’opinion publique, notamment dans les périodes de crise économique où l’exigence de transparence et de sobriété se fait plus forte. De Gaulle, par son comportement, offre un contre-exemple éclatant. Non pas parce qu’il voulait « faire de la communication« , mais parce que telle était sa conception du devoir et de l’honneur.

Un héritage moral plus que politique

Aujourd’hui encore, le comportement de Charles de Gaulle inspire une nostalgie particulière. Au-delà de la politique, il incarne une exigence morale devenue rare. En refusant la confusion entre fonds publics et vie privée, il montrait qu’un Président n’est pas au-dessus des règles, mais qu’il doit être le premier à les respecter.

Cette probité, ce refus du privilège, cette sobriété volontaire font partie intégrante de l’image du Général. Elles expliquent pourquoi, plus d’un demi-siècle après sa mort, il reste une figure respectée, même par ceux qui ne partagent pas ses choix politiques.

De Gaulle, une leçon de probité pour notre temps

Alors que la société française s’interroge sur le coût de ses institutions et sur les privilèges accordés aux responsables politiques, l’exemple de Charles de Gaulle apparaît comme une leçon intemporelle. Il nous rappelle qu’un chef d’État peut être grand non seulement par ses décisions stratégiques, mais aussi par sa rigueur personnelle et son désintéressement matériel.

En payant ses propres factures, en refusant la retraite présidentielle et en choisissant une vie simple à La Boisserie, De Gaulle a montré qu’il n’exigeait rien pour lui-même, mais tout pour la France.

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