« Le Premier Ministre peut-il diriger une ville tout en gérant les affaires de l’État ? » s’interroge Clémentine, habitante de Pau, alors que François Bayrou suscite la controverse en restant Maire de Pau malgré ses fonctions à Matignon.
François Bayrou : Premier Ministre et Maire de Pau, la polémique enfle
La volonté de François Bayrou, fraîchement nommé Premier Ministre, de conserver son poste de Maire de Pau suscite un tollé politique. Alors que l’usage instauré depuis 2012 voulait que les Ministres renoncent à leurs mandats locaux, le chef du MoDem assume pleinement son choix, relançant ainsi le débat sur le cumul des fonctions nationales et locales.
Une pratique à contre-courant de l’usage en vigueur
Depuis la présidence de François Hollande, les membres du gouvernement avaient pris l’habitude de se démettre de leurs mandats locaux. Jean-Marc Ayrault avait quitté la Mairie de Nantes, tout comme Édouard Philippe celle du Havre et Jean Castex celle de Prades.
L’idée ? Permettre une concentration totale sur les tâches gouvernementales. Mais pour François Bayrou, ce précédent constitue une erreur : « On a rompu tout lien entre la démocratie locale et la démocratie nationale », déclarait-il déjà en 2022.
Cette fois, il joint la parole aux actes. En pleine crise à Mayotte, marquée par le cyclone Chido et une situation humanitaire alarmante, le Premier Ministre s’est envolé pour Pau afin de présider le conseil municipal. Un déplacement qui ne passe pas inaperçu et qui suscite la fureur de l’opposition.
Une opposition vent debout
« Premier Ministre à mi-temps », ironise Guillaume Bigot, Député RN du Territoire de Belfort. Pour lui, la priorité nationale aurait dû être accordée à Mayotte. Même son de cloche du côté des Républicains : Thibault Bazin, Député de Meurthe-et-Moselle, reproche à François Bayrou de délaisser des problèmes nationaux urgents pour un conseil municipal local. « Monsieur Bayrou, le conseil municipal de Pau pourrait se passer de votre présence ce soir », a-t-il déclaré.
La Députée LFI Zahia Hamdane est allée plus loin en accusant François Bayrou d’absence de leadership en temps de crise : « Mayotte dévastée, pas le début d’une once de gouvernement. Y a-t-il un pilote dans l’avion ? »
François Bayrou assume pleinement son choix
François Bayrou reste toutefois fidèle à sa vision politique. Pour lui, conserver un mandat local n’est pas une question de cumul de pouvoir, mais un moyen de rester en contact avec la « réalité concrète des Français ». Son premier adjoint à Pau, Jean-Louis Pérès, a défendu cette posture en soulignant que les problèmes nationaux trouvent souvent leurs réponses à l’échelle locale.
« C’est souhaitable. François Bayrou est ici chez lui et comprend les difficultés du terrain, ce que les Français attendent de leurs dirigeants », a-t-il affirmé sur France Bleu. Une position qui ne convainc pas ses détracteurs, pour qui le cumul des fonctions nuit à l’efficacité de la gouvernance.
Un débat relancé sur le cumul des mandats
L’article 23 de la Constitution interdit formellement aux membres du gouvernement de cumuler leur fonction ministérielle avec un mandat parlementaire, mais ne dit rien des fonctions locales. Si la pratique avait été condamnée par l’usage, elle demeure légale. François Bayrou souhaite d’ailleurs aller plus loin : Il plaide pour une révision de cette interdiction pour les parlementaires afin de recréer un « lien fort entre les échelons local et national ».
Son choix réactive donc un débat sensible sur la compatibilité des mandats, opposant partisans d’une gouvernance ancrée dans le local et défenseurs d’une dédication totale aux affaires nationales.
Pour l’heure, la polémique ne faiblit pas, et le Premier Ministre continue de diviser l’opinion publique entre pragmatisme assumé et coup de communication controversé.