Question posée par Manon : « Comment peut-on encore espérer justice quand une enfant est tuée sur sa bicyclette et que la conductrice repart libre, sans même un jour derrière les barreaux ? »
Une matinée d’innocence à La Rochelle
Le mercredi 5 juin 2024, le ciel est doux au-dessus de La Rochelle, ville portuaire réputée pour sa tranquillité et ses pistes cyclables. Il est environ 9h du matin quand un groupe d’enfants s’élance sur une route de l’avenue Coligny, accompagnés par des adultes. Parmi eux, Margot, une fillette de 10 ans, rayonne de joie, casque vissé sur la tête, les mains bien posées sur le guidon.
Ils roulent par deux, en file bien encadrée, dans le cadre d’une sortie scolaire sur la sécurité routière. Le parcours a été balisé, les encadrants ont pris soin de choisir une voie calme, avec un trafic réduit. Mais en l’espace d’un instant, ce moment pédagogique va se transformer en cauchemar absolu.
Le choc brutal et l’instant figé
Une Citroën C3 blanche surgit, roulant à contre-sens. Derrière le volant : Josette M., 83 ans, retraitée vivant seule à La Rochelle. Sa conduite est inexplicable. Elle ne freine pas. Elle n’essaie pas de dévier. Elle fonce droit sur les enfants, fauche violemment six d’entre eux. Margot est percutée de plein fouet, projetée plusieurs mètres plus loin.
Les hurlements. Les vélos tordus. Le sang. Les enfants à terre. Les encadrants paniqués.
La voiture ne s’arrête pas. Elle poursuit son chemin.
Ce n’est que quelques centaines de mètres plus loin, stoppée par un témoin, que la conductrice s’immobilise. Elle est désorientée, confuse. Elle prétendra plus tard ne se souvenir de rien.
Margot, entre la vie et la mort
Margot est immédiatement transportée en urgence absolue par hélicoptère au CHU de Tours. Son état est critique. Elle est plongée dans un coma profond. Les médecins parlent de traumatisme crânien massif, de lésions internes irréversibles.
Deux jours plus tard, le 7 juin 2024, l’impensable est confirmé : Margot est déclarée morte.
Une fillette fauchée sur sa bicyclette. Une famille brisée. Une école traumatisée. Une ville sous le choc.
La conductrice : 83 ans, aucune trace de freinage
Josette M. n’a jamais été testée positive à l’alcool ou aux stupéfiants. Elle n’était pas sous l’emprise d’un médicament illicite. Mais elle souffrait, selon ses proches, de « malaises fréquents » ces derniers mois. Elle a pourtant pris le volant, seule, ce matin-là, pour aller faire des courses.
Les expertises révèlent qu’elle roulait à contre-sens sur une voie limitée à 30 km/h. Elle ne freine pas. Elle ne réagit pas. Le choc, violent, démontre l’absence totale de vigilance.
Le procès : Les mots qui ne viennent pas
Le 1er juillet 2025, Josette M. est jugée devant le tribunal correctionnel de La Rochelle pour homicide involontaire aggravé par une violation manifeste d’une obligation de prudence ou de sécurité.
Dans la salle, les parents de Margot. Silencieux. Le regard droit. Le deuil dans la peau.
Josette, quant à elle, apparaît fragile, lente, appuyée sur une canne. Son avocat, Me Vincent Berthault, plaide la confusion mentale, évoque une femme âgée, perdue, incapable de faire face à ce qu’elle a causé. Lorsqu’elle prend la parole, elle murmure :
« Je demande pardon aux parents… particulièrement aux parents de la petite Margot. »
Mais il est trop tard. Les parties civiles, représentées par Me Vincent Julé-Parade, dénoncent une absence de sincérité, une distance émotionnelle glaçante, et surtout un refus obstiné de reconnaître la gravité des faits.
Le verdict : 4 ans de prison… avec sursis
Le 22 juillet 2025, la décision tombe :
🔹 4 ans de prison avec sursis
🔹 Annulation immédiate du permis de conduire
🔹 Interdiction de repasser le permis pendant 5 ans
🔹 Confiscation du véhicule
🔹 Amende de 200 euros
Le tribunal reconnaît que Josette M. avait conscience de son état de santé fragile, qu’elle aurait dû renoncer à conduire. Mais l’âge, l’absence d’antécédents judiciaires, et son état actuel ont poussé la juridiction à prononcer une peine entièrement avec sursis.
La salle est figée. Les parents de Margot sont abasourdis. Aucune peine ferme. Aucune privation de liberté.
Le coup de grâce : L’appel de la conductrice
Le 28 juillet 2025, coup de théâtre. Josette M., par l’intermédiaire de son avocat, fait appel du jugement. Elle estime que le tribunal est allé « au-delà de ce que prévoit la loi », en la condamnant à une peine excessive au regard de son profil.
C’est un nouveau choc pour la famille de Margot. Me Julé-Parade exprime leur colère :
« Cet appel, c’est une forme de fuite supplémentaire. Une manière de retarder l’évidence. D’éviter une fois encore de dire : “oui, j’ai tué une enfant.” »
Une France sans règles pour les conducteurs âgés ?
Le drame de La Rochelle soulève une question brûlante : Faut-il imposer des contrôles médicaux obligatoires pour les conducteurs âgés en France ?
Contrairement à certains pays européens comme l’Italie ou le Danemark, la France n’impose aucun examen médical automatique après un certain âge pour renouveler un permis de conduire. À 83 ans, Josette M. n’a fait l’objet d’aucun contrôle d’aptitude, malgré ses antécédents de malaises.
Ce vide juridique, aujourd’hui, a coûté la vie à une enfant.
Margot, 10 ans, pour toujours figée dans le temps
Elle aimait le vélo. Elle rêvait de devenir vétérinaire. Elle riait fort avec ses copines dans la cour. Elle s’appelait Margot, et elle n’aura jamais 11 ans.
Le procès continue, en appel. Mais pour ses parents, pour ses camarades, pour ses enseignants, rien ne pourra réparer le vide.
⚖️ Un appel, une fracture
L’appel de la conductrice n’est pas qu’un acte juridique. C’est un symbole de fracture entre deux visions de la justice :
👉 Celle qui considère que l’intention doit primer sur le résultat,
👉 Et celle qui demande qu’une vie d’enfant pèse plus que les années d’une conductrice âgée.
🕯️ Margot est morte sur une piste cyclable, en plein jour, sous les roues d’une voiture conduite par une femme qui n’aurait jamais dû prendre le volant.
Et aujourd’hui encore, sa famille attend qu’on dise simplement : « C’était injustifiable. »

Yann GOURIOU est rédacteur et responsable éditorial de MyJournal.fr. Passionné d’actualité, de société et de récits de vie, il signe chaque article avec une approche humaine, sensible et engagée. Installé en Bretagne, il développe un journalisme proche du terrain, accessible et profondément ancré dans le quotidien des Français.

4 ans de prison avec SURCIS c’est juste une honte pour la victime et surtout pour sa famille.