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Locataires : Devez-vous écrire une lettre de motivation pour obtenir un logement ?

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Marie, 28 ans, vit à Paris et cherche désespérément un nouvel appartement. Lors de sa dernière visite, l’agent immobilier lui a demandé un dossier de location très détaillé. Surprise, elle découvre qu’en plus des traditionnels justificatifs de revenus et garanties, il lui est demandé une lettre de motivation. « Je ne pensais pas qu’on pouvait en arriver là ! » s’exclame-t-elle. Comme Marie, de nombreux locataires se voient aujourd’hui confrontés à cette nouvelle exigence, surtout dans des villes où le marché immobilier est saturé.

La lettre de motivation, une nouvelle norme dans certaines villes

Dans les grandes villes comme Paris, Lyon ou Bordeaux, la demande en logements dépasse largement l’offre. Cette situation tendue conduit les propriétaires et agences à adopter des critères de sélection de plus en plus rigoureux. Ainsi, au même titre que pour une candidature d’emploi, la lettre de motivation devient un moyen pour les propriétaires de mieux connaître les locataires et de choisir parmi eux ceux qui semblent le plus « fiables » et « sérieux« .

Pourquoi cette pratique se généralise-t-elle ?

Selon Patrice Petit, responsable de la gestion de biens chez Orpi, il s’agit surtout d’une pratique répandue à Paris et initiée par certains propriétaires exigeants. Mais ce qui est nouveau, c’est que des agences immobilières s’y mettent également, parfois à la demande des propriétaires. Cette lettre de motivation permet aux bailleurs de se faire une idée de la personnalité du locataire, de sa capacité à s’exprimer correctement, mais aussi de ses projets de vie. Les critères ne sont plus uniquement financiers mais aussi sociaux, favorisant des candidats considérés comme « plus solides » ou « plus rassurants ».

Une pratique jugée discriminante… et illégale

Bien que courante, cette demande de lettre de motivation est en réalité illégale. En effet, le décret n° 2015-1437, émanant de la loi ALUR et mis en place en 2015, régit les documents que peuvent exiger les propriétaires lors d’une location. Parmi eux figurent notamment les justificatifs de revenus, les garanties, et les pièces d’identité. Mais la lettre de motivation ne fait en aucun cas partie de cette liste !

« C’est une manière détournée de sélectionner les locataires en fonction de leur niveau social », déplore Patrice Petit. En effet, certains propriétaires scrutent la qualité rédactionnelle, le choix des mots, et même l’orthographe, créant ainsi une discrimination implicite. Cette demande peut exclure des candidats simplement parce qu’ils n’ont pas un bon niveau de français ou ne savent pas « se vendre » à l’écrit.

Une pratique qui pourrait se généraliser dans d’autres villes de France

Avec la pression sur le marché immobilier qui s’étend au-delà de Paris, des villes comme Lyon, Bordeaux, et même Nantes voient cette pratique se répandre. Les candidats locataires doivent souvent fournir de nombreux documents, prouvant non seulement leur solvabilité mais aussi leur capacité à s’intégrer dans le voisinage. Cela pose la question de la frontière entre exigence légitime et abus de pouvoir.

Les dérives possibles : Pourquoi certains propriétaires vont trop loin ?

Certains locataires rapportent des exigences excessives, notamment la rédaction d’une lettre de motivation où l’on leur demande de décrire leurs habitudes de vie, leurs centres d’intérêt ou encore leur parcours professionnel. Ce phénomène, bien que réprimandé par des associations comme la CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie), persiste. Car même si ces lettres sont illégales, les candidats se sentent souvent obligés de les fournir par peur de perdre une opportunité de logement.

Que faire en cas de demande abusive ?

Si vous êtes confronté à une demande de lettre de motivation, sachez que vous avez des recours. En France, la loi est claire sur les documents exigibles lors d’une demande de location. Si le propriétaire ou l’agence vous oblige à fournir une lettre de motivation, vous pouvez le signaler :

  • CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie) : Cette association de défense des consommateurs aide les locataires en cas d’abus. N’hésitez pas à les contacter pour un accompagnement juridique.
  • DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) : La DGCCRF reçoit les signalements des locataires victimes d’abus de la part des propriétaires ou agences. Elle peut également sanctionner les contrevenants.
  • Adil (Agence Départementale d’Information sur le Logement) : Ces agences locales peuvent informer et conseiller les locataires sur leurs droits et les démarches à suivre.

Comment rédiger une lettre de motivation… si vous n’avez pas le choix

Si, malgré tout, vous décidez de rédiger une lettre de motivation, voici quelques conseils pour optimiser vos chances de plaire au propriétaire tout en restant authentique :

  • Restez bref : Inutile de vous étendre sur votre vie personnelle. Quelques phrases sur vos motivations pour louer cet appartement suffisent.
  • Montrez votre stabilité : Parlez de votre emploi, de votre stabilité financière et de votre intention de rester à long terme dans le logement.
  • Mettez en avant votre sérieux : Soulignez votre sens des responsabilités, le soin que vous apportez à votre logement actuel et votre capacité à entretenir l’appartement.
  • Rassurez sans trop en faire : Ne tombez pas dans l’excès. Un propriétaire appréciera un locataire fiable mais pourrait trouver suspect un texte trop « vendeur« .

La lettre de motivation est-elle vraiment nécessaire ?

Sur le papier, la lettre de motivation est illégale, mais dans les faits, elle est de plus en plus utilisée. Pour les locataires, cela devient un choix difficile : Refuser de la fournir et risquer de perdre un logement, ou céder à la demande pour maximiser leurs chances. Cette pratique, jugée discriminatoire et en dehors du cadre légal, souligne les difficultés du marché immobilier dans les grandes villes françaises.

Les locataires doivent connaître leurs droits et ne pas hésiter à faire appel aux associations de consommateurs pour défendre leur dossier. En attendant, la vigilance reste de mise face à ce phénomène grandissant dans un contexte où l’accès au logement devient chaque jour plus complexe.

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