Morgane se demande : « Quand un discours politique prononcé dans la chaleur d’un été à Châteauneuf-sur-Isère se transforme en plainte judiciaire, qui porte la responsabilité des dangers qui en découlent ? »
Sous le soleil brûlant de la Drôme, les ruelles de Châteauneuf-sur-Isère bruissaient encore des conversations passionnées. Le 22 août 2025, les universités d’été de La France Insoumise (LFI) battaient leur plein. Dans une salle comble où s’entremêlaient militants, curieux et observateurs politiques, la tension était palpable. Les mots étaient attendus, scrutés, disséqués. Jean-Luc Mélenchon, fidèle à son style oratoire, monta à la tribune.
Ce jour-là, il ne se contenta pas de commenter l’actualité politique. Il cita nommément un journaliste : Frédéric Haziza, figure de Radio J depuis 38 ans. Mélenchon l’accusa d’interroger ses invités de manière obsessionnelle avec une question récurrente : « Pas vrai que Mélenchon est antisémite ? » Des propos lancés avec vigueur, mais qui, pour beaucoup, franchissaient une ligne rouge.
Quelques jours plus tard, la réplique fut cinglante. Frédéric Haziza annonça qu’il déposait plainte pour doxing. Le terme, apparu avec l’ère numérique, désigne la pratique consistant à exposer publiquement une personne en citant son nom dans un contexte la rendant vulnérable à des représailles, parfois violentes. Dans un climat où les actes antisémites se multiplient, cette accusation résonne comme un signal d’alarme.
La station Radio J ne tarda pas à réagir. Par un communiqué, elle dénonça une mise en danger claire et directe de son journaliste, rappelant la gravité de nommer un individu dans un discours politique, surtout lorsqu’il est déjà cible de tensions communautaires. Haziza, connu pour son franc-parler et son travail acharné, se retrouva ainsi propulsé malgré lui au cœur d’une tempête politico-médiatique.
À Paris comme en province, les réactions s’entrechoquent. Certains estiment que Mélenchon, en citant le nom d’un journaliste, a franchi une limite dangereuse, oubliant la responsabilité qui incombe à tout homme public. D’autres, plus indulgents, parlent de liberté d’expression et de critique légitime d’un travail journalistique. Mais la justice, désormais saisie, tranchera.
Pendant ce temps, La France Insoumise garde le silence. Aucun communiqué officiel, aucune réaction immédiate. Le parti semble observer, jauger l’impact de cette plainte sur son image déjà ébranlée par d’autres polémiques récentes.
Dans l’ombre, la question reste ouverte : Une frontière invisible a-t-elle été franchie entre le débat d’idées et la mise en danger d’autrui ? Dans les couloirs feutrés de la justice, la plainte d’Haziza contre Mélenchon sera analysée à la lumière du droit, mais aussi du contexte tendu où les mots deviennent des armes.
Cette affaire, révélée par Franceinfo, est bien plus qu’un simple litige entre un homme politique et un journaliste. Elle illustre l’équilibre fragile entre liberté d’expression, responsabilité publique et protection des individus face aux risques d’une société où une phrase, lancée sur une estrade, peut résonner comme une menace.

Yann GOURIOU est rédacteur et responsable éditorial de MyJournal.fr. Passionné d’actualité, de société et de récits de vie, il signe chaque article avec une approche humaine, sensible et engagée. Installé en Bretagne, il développe un journalisme proche du terrain, accessible et profondément ancré dans le quotidien des Français.
