Une campagne institutionnelle mal reçue : analyse de la polémique autour de l’affiche anti-vendeurs à la sauvette à Paris.

Affiche anti-vendeurs à la sauvette : Polémique autour d’une affiche jugée « trompeuse » de la Préfecture de police de Paris

SOCIETE

Paris, début août 2025. Dans le flux continu des publications institutionnelles, un simple visuel allait enflammer les débats, générer des moqueries virales et obliger ses auteurs à le retirer en urgence. La Préfecture de police de Paris, habituée à diffuser des messages de prévention, ne s’attendait pas à un tel retour de flamme.

Tout commence par une publication sur les réseaux sociaux officiels de la préfecture. Sur l’image, un homme blanc, chemise claire et expression exagérément insistante, tend au spectateur une miniature dorée de la Tour Eiffel. En arrière-plan, le monument emblématique trône fièrement. En légende, le message :

« N’achetez aucun objet à des vendeurs à la sauvette ! Vous alimentez des réseaux clandestins et illégaux. Préférez les revendeurs autorisés pour des souvenirs sûrs et de qualité. Ne vous laissez pas tenter ! »

La volonté affichée est claire : Décourager les touristes d’acheter des souvenirs à la sauvette, un commerce illégal qui gangrène certains lieux emblématiques, de la Tour Eiffel au Sacré-Cœur. Mais très vite, le visuel attire l’attention… pour de mauvaises raisons.

Car sur le terrain, chacun le sait : La grande majorité des vendeurs à la sauvette opérant autour de la Tour Eiffel sont de jeunes hommes originaires d’Afrique. Or, la campagne institutionnelle montre un vendeur européen, au style presque caricatural.

Le décalage choque, amuse, irrite.

Affiche anti-vendeurs à la sauvette de la Préfecture de police de Paris

Une pluie de réactions moqueuses

En moins de 24 heures, les réseaux sociaux s’emparent de l’affaire. Sur X (ex-Twitter), les messages fusent. L’écrivain et chroniqueur Éric Naulleau ironise :

« Tout à fait le portrait-robot du vendeur à la sauvette. Il suffit d’aller se promener du côté de la Tour Eiffel pour le vérifier. »

Le militant Damien Rieu se montre plus direct :

« Jean-Édouard le vendeur à la sauvette alors que 100% sont des Africains. De qui vous moquez-vous ? »

Même tonalité du côté du collectif féministe identitaire Némésis :

« Vraie question : Vous avez déjà vu un vendeur à la sauvette européen ? »

La communication visuelle est jugée « déconnectée » par une grande partie des internautes. Certains dénoncent un choix hypocrite pour éviter toute accusation de discrimination raciale, quitte à produire une image qui ne reflète pas la réalité.

Des critiques venues aussi du terrain

Au-delà des moqueries, certains professionnels s’interrogent sur l’efficacité de la campagne. Axel Ronde, porte-parole du syndicat CFTC Police, explique :

« Cette affiche est un peu enfantine, elle s’adresse plutôt à un public d’enfants. On a l’impression que c’est rigolo d’acheter une Tour Eiffel à un vendeur à la sauvette. La préfecture n’a pas forcément bien réalisé sa campagne de prévention. »

Pour lui, une telle communication ne dissuade pas vraiment les acheteurs, et détourne même l’attention du message principal.

Un retrait rapide et un précédent

Face à la polémique grandissante, la Préfecture de police de Paris retire l’affiche au bout de quelques jours. Pas de communiqué officiel détaillant les raisons, mais la décision parle d’elle-même : L’opération a été un échec.

Ce n’est pas la première fois que la communication institutionnelle française se heurte à ce type de problème. En 2024, une campagne contre les rodéos urbains avait suscité des rires pour avoir représenté un conducteur en col roulé… loin du profil réel des auteurs de ces infractions. Le phénomène semble se répéter : Par peur d’être accusées de stigmatiser certaines populations, les autorités produisent des visuels qui perdent en crédibilité.

Une leçon de communication

Pour Élise, qui observait la scène ce jour-là sur son smartphone, le constat est simple : L’image a plus marqué que le message. Et dans une société ultra-connectée, un visuel qui déclenche le sarcasme est souvent synonyme de campagne ratée.

La Préfecture de police voulait sensibiliser au problème des vendeurs à la sauvette, un commerce illégal qui alimente parfois des filières criminelles. Mais au lieu d’ancrer ce message dans l’esprit du public, elle a déclenché une tempête de tweets moqueurs et alimenté le débat sur la sincérité de la communication publique.

SOURCE : Article du JDD, le 6 août 2025.

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