Sur TikTok, des jeunes salariés filment en direct leur démission — un geste devenu marqueur d’une génération qui revendique un nouveau rapport au travail.
Le bruit d’un clic. Une visio qui s’ouvre. Un sourire, un “c’est fini” à peine dissimulé. Sur TikTok, une nouvelle forme de départ retient l’attention : Le phénomène du quittoking. La génération née entre 1997 et 2012 filme sa démission. Et la partage. À la grande surprise – ou parfois l’inquiétude – de ses employeurs.
Cette génération, que l’on appelle “Gen Z”, ne s’inscrit plus dans la logique de carrière longue, de reconnaissance tardive, de sacrifier sa vie personnelle pour le travail. Elle veut vivre, oui, mais travailler autrement. Quitter son poste ne devient pas une honte : Cela devient un geste, presque un message. Une prise de parole.
Dans cette vidéo-démission, le décor est souvent familier : Une chambre éclairée à la lumière froide, un bureau vide, un téléphone ou l’écran de visio. Le logo de l’entreprise n’apparaît pas, mais l’intention est manifeste : « Je ne me reconnais plus dans ce modèle ». Car ce que révèlent ces départs filmés, ce n’est pas seulement la vanité d’un jour, mais une aspiration profonde : 92 % des jeunes diplômés accordent plus d’importance à leur vie personnelle qu’à leur vie professionnelle. 87 % assurent qu’ils ne feront pas toute leur carrière dans la même boîte. Ces données sont significatives : Elles dessinent un monde du travail en mutation.
Le terme « quittoking » — contraction volontaire de “quitter” et “King” — n’est plus anecdote. Il cristallise un paradoxe : Montrer sa démission comme une victoire, quand pour leurs aînés démissionner pouvait être un échec. Aujourd’hui, ce geste viral devient un marqueur de liberté. Une déclaration : “Je travaille pour vivre, je ne vis pas pour travailler”.
Mais au-delà du défi symbolique, il y a une tension réelle. Les jeunes salariés dénoncent des conditions de travail bancales, des salaires trop faibles, un épuisement sans reconnaissance. Le phénomène du quittoking en est l’écho. Il interroge l’engagement, les attentes, la relation entre entreprise et talent.
Les employeurs, eux, sont déstabilisés. L’engagement ne peut plus s’acheter uniquement par un CDI ou une promesse d’évolution. La visibilité de ces démissions filmées rappelle que la gestion de l’humain passe par la reconnaissance, la flexibilité, le sens. Que la fidélité ne se décrète pas : Elle se gagne.
Le quittoking n’est pas qu’un buzz. Il est le signe d’un malaise, mais aussi d’une opportunité : Celle d’une refondation du monde du travail. Pour la Gen Z, tout reste à écrire.

Yann GOURIOU est rédacteur et responsable éditorial de MyJournal.fr. Passionné d’actualité, de société et de récits de vie, il signe chaque article avec une approche humaine, sensible et engagée. Installé en Bretagne, il développe un journalisme proche du terrain, accessible et profondément ancré dans le quotidien des Français.
