Gaza : pourquoi la France accorde maintenant le statut de réfugié aux Palestiniens fuyant la guerre et la persécution.

En France, les exilés de Gaza peuvent désormais obtenir le statut de réfugié

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Il était 9h42 ce vendredi 11 juillet 2025 quand la salle d’audience de la Cour nationale du droit d’asile, à Montreuil, s’est figée dans un silence suspendu. Des regards inquiets, des cœurs serrés, des mains tremblantes, et au centre, des Gazaouis venus des quatre coins de France, dans l’espoir d’un miracle. Puis la présidente a prononcé la phrase que personne n’osait vraiment espérer : « La qualité de réfugié est reconnue à l’ensemble des demandeurs originaires de la bande de Gaza, en raison des persécutions systématiques qu’ils subissent. »

Il n’y a pas eu de cris de joie. Juste des larmes. Silencieuses. Profondes. Celles d’hommes qui avaient tout perdu, sauf l’espoir. Celles de femmes dont les bras ne portaient plus que des souvenirs. Celles d’enfants qui ne connaissaient de leur pays que le son des bombes et la faim des nuits sans lumière.

Pour la première fois de son histoire, la France reconnaissait que fuir Gaza ne relève pas d’un choix politique ou économique, mais d’un besoin vital de survie.

Une rupture avec des années de silence

La décision rendue par la CNDA (Cour nationale du droit d’asile) ne s’est pas construite en un jour. Elle est le fruit d’une lente maturation, d’un basculement géopolitique provoqué par la guerre entre Israël et le Hamas, mais aussi par l’effondrement total des infrastructures civiles dans la bande de Gaza depuis octobre 2023.

Jusqu’ici, les demandeurs d’asile palestiniens venus de Gaza voyaient leurs dossiers traités au cas par cas, avec un taux de rejet élevé. Beaucoup étaient déboutés, sommés de repartir vers un territoire devenu inhabitable. Certains étaient assignés à résidence dans des hôtels sociaux, d’autres erraient dans les rues de Calais, de Paris ou de Nantes, dans un entre-deux-mondes où ni l’exil ni l’avenir n’étaient vraiment clairs.

Mais le 11 juillet 2025, la France a tranché : Tous les Gazaouis sont désormais considérés comme des personnes persécutées. Leur nationalité suffit à justifier une protection internationale.

La fin d’une exception juridique

Jusqu’à présent, les Palestiniens étaient dans une situation juridique particulière. La Convention de Genève de 1951 sur les réfugiés ne s’appliquait pas toujours de façon uniforme à leur cas, en raison de l’existence de l’UNRWA (l’agence de l’ONU chargée des réfugiés palestiniens). La France, comme d’autres pays européens, se retranchait souvent derrière cette spécificité pour refuser des demandes d’asile.

Mais la guerre, l’effondrement des services de l’UNRWA à Gaza, les bombardements incessants et les pénuries absolues ont balayé ces subtilités juridiques. La CNDA l’affirme désormais noir sur blanc : « Aucun Gazaoui n’est protégé de manière effective par une autorité ou une organisation. »

Témoignages bouleversants à l’origine de cette décision

Il y a eu celui de Mahmoud, 34 ans, boulanger à Khan Younès, dont la boutique a été pulvérisée par un missile. Celui d’Hana, institutrice, dont les trois enfants ont péri dans un camp de déplacés. Celui d’Ahmed, médecin, arrêté puis torturé par le Hamas pour avoir soigné des blessés sans demander leur affiliation politique.

Tous ont fui. Par les tunnels, par la mer, par le désert. Tous ont raconté à la CNDA qu’ils n’étaient plus en sécurité nulle part à Gaza : Ni dans leurs maisons, ni dans les écoles, ni dans les hôpitaux. Tous ont décrit un enfer d’apocalypse où la famine côtoie la mort à chaque coin de rue.

Un signal fort à l’international

Cette décision française, sans précédent, pourrait faire école en Europe. Jusqu’à présent, aucun pays n’avait adopté une reconnaissance collective des exilés de Gaza comme « réfugiés de plein droit ». Mais la France ouvre la voie. Elle brise un tabou. Elle reconnaît que l’appartenance à la population civile de Gaza est devenue, en soi, une raison suffisante d’exil.

C’est aussi un message adressé à la communauté internationale : Face à l’incurie des grandes puissances à mettre fin au conflit, face à l’échec de l’ONU à protéger les populations, les États souverains doivent assumer leur part d’humanité.

Des vies à reconstruire

Dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile, comme à Rennes, Toulouse ou Strasbourg, cette décision a été accueillie comme un souffle d’air après des mois d’apnée. Pour la première fois, les Gazaouis ne sont plus en attente. Ils peuvent maintenant prétendre à une carte de réfugié, à un logement pérenne, à un emploi, à l’école pour leurs enfants.

Mais rien n’effacera ce qu’ils ont traversé. Le traumatisme reste logé dans les corps. La langue française est encore un mur pour beaucoup. L’avenir ? Il reste incertain. Mais il existe. Et pour eux, c’est déjà une révolution.

Une reconnaissance historique pour une tragédie oubliée

La France n’a pas mis fin à la guerre. Elle n’a pas arrêté les bombes. Mais elle a dit à ces hommes, à ces femmes, à ces enfants : « Vous êtes les bienvenus. Vous avez souffert. Vous avez fui l’horreur. Ici, vous serez protégés. »

Et dans un monde où tant de portes se ferment, cette décision, symbolique et concrète à la fois, résonne comme un acte de justice. Un acte de mémoire. Un acte d’humanité.

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