Élodie se demande, le souffle court : « Comment une femme peut-elle dissimuler son ultime voyage derrière l’illusion de simples vacances, laissant ses proches dans l’ombre d’un adieu qu’ils n’auront jamais pu donner ? »
Le hall de l’aéroport bruissait ce matin-là, un 8 juillet 2025, de valises qui claquent sur le carrelage et de voix qui s’élèvent dans toutes les langues. Dans la foule, une femme au visage calme, presque apaisé, s’avançait vers la porte d’embarquement. Maureen Slough, 58 ans, Irlandaise, avait annoncé à ses proches qu’elle s’offrait quelques jours en Lituanie. Ses enfants la croyaient en route pour Vilnius, prêts à recevoir bientôt une photo de cathédrale ou un message léger sur ses découvertes.
Mais Maureen, derrière son sourire discret, cachait une vérité bouleversante. Ce billet d’avion, ce sac de voyage et ces adieux ordinaires n’étaient pas les signes d’un départ en vacances. C’était en réalité le dernier chapitre d’une vie qui allait s’achever loin des regards aimants, dans une clinique suisse spécialisée dans le suicide assisté.
Le mensonge d’un voyage imaginaire
Tout avait été minutieusement préparé. Depuis des semaines, Maureen échangeait en secret avec Pegasos, une association suisse reconnue pour accompagner les personnes décidant de mettre fin à leurs jours. Quinze mille livres sterling — environ 16 200 francs suisses — avaient été versés pour organiser l’acte. Rien n’avait filtré : Pas une hésitation, pas une confidence.
À ses proches, elle parlait d’un besoin de souffler, d’un séjour pour « changer d’air ». La Lituanie, pays lointain mais plausible, servait de paravent. Ce mensonge, aussi cruel que nécessaire à ses yeux, lui permettait de protéger son projet.
Le SMS qui a tout révélé
Ce n’est qu’au dernier moment que le voile s’est déchiré. Une amie, mise dans la confidence, a écrit à Megan, la fille de Maureen :
« Ta mère n’est pas en Lituanie. Elle est en Suisse. Tu dois agir vite. »
Un message glaçant, qui a provoqué une panique immédiate. Megan a tenté d’appeler, d’écrire, de retenir sa mère à distance. Mais il était trop tard. Lorsque la vérité a éclaté, le processus était déjà engagé, irréversible.
Le dernier souffle en Suisse
Dans la chambre neutre de la clinique, Maureen s’est assise face aux médecins. L’endroit n’avait rien d’un hôpital oppressant : Quelques plantes, une lumière douce, un silence respectueux. On lui a expliqué une dernière fois les étapes, demandé si elle était sûre. Elle a confirmé d’un hochement de tête, ferme mais tremblant.
Un liquide transparent l’attendait dans un gobelet. Elle l’a pris entre ses mains, comme on saisit un verre d’eau après une longue marche. Quelques minutes après l’avoir avalé, son souffle s’est ralenti. Le sommeil est venu, puis l’absence totale.
Une famille sidérée, sans adieux
Pour sa famille, le choc a été d’une violence inouïe. Non seulement ils perdaient une mère, une amie, une sœur, mais ils découvraient qu’elle avait choisi de partir sans leur donner l’occasion de lui dire adieu.
« Nous pensions qu’elle profitait de vacances. Elle avait même promis de nous envoyer des photos », a confié Megan, encore bouleversée, à Ouest-France. La douleur du deuil se mêle désormais à la colère et à l’incompréhension.
Le débat brûlant sur la fin de vie
Au-delà de l’histoire intime, ce drame relance un débat qui divise l’Europe : Faut-il encadrer le suicide assisté, l’autoriser, ou continuer à l’interdire ? La Suisse, pays pionnier, accueille des centaines d’étrangers chaque année venus chercher une fin choisie. Mais cette pratique soulève des questions éthiques :
- Est-ce un ultime acte de liberté, une dignité retrouvée ?
- Ou est-ce un abandon, une blessure infligée à ceux qui restent ?
En France, en Irlande et ailleurs, la question de la fin de vie continue de susciter polémiques et passions. L’histoire de Maureen Slough, avec son cortège de silence et de douleur, devient malgré elle un symbole de ce débat inachevé.
Le poids du silence
Il reste à sa famille les souvenirs heureux, mais aussi une cicatrice : Celle de n’avoir pas su, pas pu, pas eu le droit de partager les derniers instants. Derrière le mensonge d’un billet pour la Lituanie, il y avait une détresse profonde, une décision radicale.
Maureen a choisi sa mort comme on choisit un voyage, en préparant chaque détail, en cachant sa destination réelle. Elle a quitté ce monde sans faire de bruit, laissant derrière elle une question lancinante : Faut-il respecter ce silence ou le dénoncer comme une injustice ?