Un arrêt de travail pour maladie impacte-t-il les cotisations retraite ?

Continue-t-on à cotiser pour la retraite durant un arrêt maladie ?

SOCIETE

Un matin de novembre, tout a basculé

Camille avait 48 ans. Fonctionnaire territoriale depuis plus de vingt ans, elle jonglait chaque jour entre ses dossiers, les réunions interminables et les sollicitations incessantes de sa hiérarchie. À la maison, ce n’était pas mieux : Deux ados, une mère vieillissante dont elle devait s’occuper, et un compagnon absent, accaparé par son entreprise. Le matin du 14 novembre, son corps a dit stop. Vertiges, larmes, étouffement : Son médecin n’a pas hésité une seule seconde. Burn-out sévère. Arrêt de travail immédiat. Durée estimée : « Minimum trois mois ». Elle en fera finalement dix.

Camille, qui n’avait jamais manqué plus de deux jours d’affilée en vingt-cinq ans, s’est soudain retrouvée enfermée dans un quotidien silencieux, solitaire et rempli de doutes. Mais plus que sa santé, un autre sujet la hantait : « Et ma retraite ? Je cotise encore, là ?« 

Arrêt maladie : Travaille-t-on encore pour sa retraite ?

Cette question, Camille l’a posée à sa caisse de retraite, à son médecin, à une amie juriste… et sur un forum. Elle n’est pas la seule. En réalité, des centaines de milliers de Français passent chaque année par un arrêt maladie plus ou moins long, sans savoir ce qu’il adviendra de leurs droits à la retraite. Pourtant, contrairement aux idées reçues, la retraite n’est pas suspendue en cas d’arrêt maladie. Elle continue… mais autrement.

Comprendre la mécanique invisible des trimestres validés

En France, un trimestre de retraite n’est pas nécessairement lié à une somme cotisée, mais aussi à la durée de perception de certaines prestations. Lors d’un arrêt maladie, la Sécurité Sociale verse des indemnités journalières (IJSS). Ces indemnités permettent de valider des trimestres dits « assimilés ».

➡️ Concrètement : Un trimestre est validé tous les 60 jours d’indemnités journalières versées, dans la limite de 4 trimestres par an. Peu importe le montant de l’indemnité. Même si vous touchez moins que votre ancien salaire, vos droits à la retraite de base sont maintenus.

Camille, arrêtée 10 mois, a donc validé 4 trimestres sur cette année-là. Elle l’ignorait, et ce simple fait l’a soulagée comme si on lui rendait un morceau de vie.

Mais quid du montant de la pension ? Un piège méconnu

Valider des trimestres ne signifie pas toucher une retraite pleine et entière. En effet, pour le calcul du montant de la pension, seule la rémunération perçue est prise en compte… et les indemnités journalières ne comptent pas dans ce calcul.

➡️ Résultat : Si l’arrêt intervient lors de vos meilleures années salariales, notamment en fin de carrière, il peut faire baisser votre salaire annuel moyen, et donc votre pension finale.

Dans le cas de Camille, ce détail a piqué. Elle venait de décrocher un poste mieux rémunéré quelques mois avant son burn-out. Si elle ne reprend pas avant sa retraite, les effets sur son montant de pension seront réels.

Et la retraite complémentaire ? Une autre logique, parfois favorable

Camille ne comprenait pas bien la différence entre retraite de base et complémentaire. Comme des millions de salariés, elle cotisait aussi à l’Agirc-Arrco. Là aussi, les périodes d’arrêt maladie peuvent ouvrir droit à des points gratuits, même sans cotisation effective.

➡️ Pour cela, l’arrêt doit durer au moins 60 jours consécutifs, et être reconnu par la Sécurité Sociale. Si c’est le cas, des points « gratuits » sont inscrits à votre compte. Ce système compense en partie la perte de cotisations, à condition que les justificatifs soient correctement transmis.

Heureusement, son employeur avait bien rempli les déclarations. Camille a conservé ses droits complémentaires. Une bonne nouvelle dans l’océan de ses incertitudes.

Cas spécifiques : Maladie professionnelle, accident du travail, invalidité

Tous les arrêts maladie ne sont pas traités de la même façon.

➡️ Maladie professionnelle ou accident du travail : Les IJSS perçues sont prises en compte de la même manière que les arrêts maladie classiques pour la validation des trimestres.

➡️ Invalidité : Là encore, la retraite continue de s’acquérir. Les trimestres sont validés jusqu’à la liquidation de la retraite, avec une éventuelle majoration selon le taux d’invalidité.

➡️ Congé longue durée dans la fonction publique : Bien qu’interrompant souvent la progression de carrière, ce congé ne fait pas perdre de trimestres… mais peut impacter la pension de base.

Comment s’assurer que vos trimestres sont bien pris en compte ?

Camille a découvert un outil qu’elle aurait aimé connaître bien plus tôt : Le relevé de carrière disponible sur le site info-retraite.fr. Ce document récapitule, année par année, tous les trimestres validés.

➡️ Il est fondamental de vérifier régulièrement ce relevé, surtout après un arrêt de longue durée. Une erreur, une omission, un oubli d’attestation… et c’est un trimestre perdu.

Conseils pratiques en cas d’arrêt maladie long

✔️ Conservez toutes vos attestations d’indemnités journalières.
✔️ Vérifiez que votre employeur a bien déclaré votre arrêt à la caisse complémentaire.
✔️ Consultez votre relevé de carrière chaque année.
✔️ Si vous êtes proche de la retraite, demandez un entretien personnalisé avec votre caisse.
✔️ Pensez à une reprise partielle (mi-temps thérapeutique) si cela permet de reprendre des cotisations plus avantageuses avant la liquidation.

Une maladie n’efface pas une vie de labeur

Camille n’a pas encore repris le travail. Mais elle sait désormais que sa retraite n’a pas été effacée. Mieux : Elle a découvert que même dans l’immobilité, la machine sociale continuait de tourner pour elle. Lentement, peut-être. Mais sûrement.

Elle a aussi compris que cette expérience l’avait obligée à s’arrêter, au sens propre comme au figuré. Et que sa retraite, comme sa santé, ne se gagnerait pas dans la course, mais dans la compréhension, l’anticipation, et parfois… dans l’acceptation.

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