Trop souvent ignorées, certaines phrases peuvent être destructrices pour une personne bipolaire. Apprenez à mieux communiquer.

Ce qu’il ne faut jamais dire à une personne bipolaire : Paroles à éviter et vrais mots qui apaisent

SANTE

Élise n’était pas médecin. Pas psychologue non plus. Elle n’était qu’une amie. Une amie qui voulait bien faire. Une amie qui, un jour d’octobre, avait vu les lèvres de Raphaël trembler alors qu’il ne disait rien. Ce n’était pas le froid. C’était autre chose. Une tempête intérieure qu’elle sentait, sans parvenir à la nommer.

Ils étaient assis au bord du vieux canal de Saint-Denis, à l’ombre d’un platane dont les feuilles mortes se posaient en silence sur la surface de l’eau. Raphaël fixait l’horizon, lointain, absent. Il ne parlait pas. Et Élise, démunie, avait fini par dire :

Tu devrais sortir un peu, ça te changerait les idées…

Elle n’avait pas terminé sa phrase qu’il s’était levé brusquement, les poings serrés, les yeux mouillés.

— Tu crois que c’est ça, hein ? Tu crois que je choisis d’aller mal ?

Élise était restée sans voix. Et c’est ce jour-là que tout avait commencé.

Des mots mal choisis, des blessures invisibles

Ce n’était pas la première fois qu’elle le voyait dans cet état. Des semaines d’hyperactivité démesurée, où Raphaël semblait vouloir conquérir le monde, suivies de silences glaçants, de journées passées à l’abri des rideaux fermés. Mais cette fois-là, il y avait eu ce déclic. Cette prise de conscience brutale : Les mots peuvent faire mal. Même quand ils partent d’une intention douce.

Depuis ce jour, Élise avait décidé de comprendre. De lire. De poser des questions. Elle avait découvert le mot « bipolaire« , mais surtout, ce que ce mot signifiait vraiment : Une lutte quotidienne contre des extrêmes émotionnels, une bataille intérieure qui ne laisse pas de repos, même quand tout semble calme à l’extérieur.

Et plus elle avançait, plus elle se rendait compte qu’elle n’était pas la seule à mal s’exprimer, à blesser sans le vouloir.

Dix phrases qu’elle ne dira plus jamais

Elle les avait notées, dans un carnet noir, comme des rappels. Dix phrases qui, désormais, ne sortiraient plus de sa bouche :

  1. « Mais t’as tout pour être heureux, arrête de faire la tête. »
    (Non, la souffrance psychique n’est pas une question de circonstances.)
  2. « Tu devrais arrêter tes médicaments, ça t’endort. »
    (Les traitements sont parfois la seule chose qui empêche le chaos.)
  3. « On a tous des hauts et des bas. »
    (Oui, mais pas à ce niveau. Pas avec cette intensité destructrice.)
  4. « T’es juste un peu sensible, c’est pas si grave. »
    (Minimiser, c’est nier. Et nier, c’est blesser.)
  5. « Tu devrais faire un effort. »
    (L’effort, justement, est constant, invisible, éreintant.)
  6. « Tu vas rechuter si tu continues comme ça. »
    (La culpabilisation n’aide jamais. Jamais.)
  7. « Tu me fais peur quand t’es comme ça. »
    (Il n’est pas un monstre. Il est malade. Et il a besoin de sécurité, pas de rejet.)
  8. « Je comprends exactement ce que tu ressens. »
    (Non. Et c’est normal. Il vaut mieux écouter que prétendre.)
  9. « Tu pourrais te contrôler un peu, non ? »
    (La perte de contrôle est justement le symptôme, pas un choix.)
  10. « Tu joues la comédie, c’est pas possible d’être aussi changeant. »
    (Ce genre de phrase peut tuer. Littéralement.)

Ce qu’il faut dire à la place : Des mots qui soutiennent, pas qui jugent

Élise avait aussi appris cela. Que le silence, parfois, est plus utile que les conseils. Que le regard qui ne juge pas vaut plus que mille phrases bancales. Mais elle avait aussi retenu quelques mots qui réconfortent. Des phrases simples, mais puissantes, quand elles sont sincères :

– « Je suis là. »

– « Tu veux que je reste avec toi ? »

– « Tu veux qu’on en parle, ou juste qu’on marche un peu en silence ? »

– « Tu n’es pas seul. »

– « Tu peux tout me dire, je ne te jugerai pas. »

– « On peut appeler ton psychiatre si tu en ressens le besoin. »

Elle avait compris qu’il ne s’agissait pas de trouver la bonne phrase. Mais d’être une présence stable. Un ancrage dans la tempête.

Comprendre la bipolarité, c’est aussi déconstruire les clichés

Raphaël n’était pas fou. Pas dangereux. Pas instable par goût du drame.

Il était ingénieur. Il adorait les films de Miyazaki. Il jouait du piano depuis l’âge de huit ans. Il connaissait par cœur tous les morceaux de Chopin. Il avait une voix calme, douce, posée. Et parfois, il disparaissait pendant des jours, enfermé dans un repli d’ombre dont il ne sortait que lentement.

La bipolarité, Élise l’avait compris, ce n’était pas un caprice. C’était une maladie neurologique, complexe, souvent méconnue, et pourtant si répandue. Plus de 1,5 million de personnes sont concernées en France. Mais combien en parlent ? Combien sont entendues ? Soutenues ? Accompagnées ?

La solitude, cet autre fardeau

C’est ce qui avait le plus frappé Élise. Plus que les phases de manie, plus que les jours noirs : L’isolement. L’impression, pour Raphaël, de n’être compris de personne. D’être un fardeau, une anomalie. Alors elle avait décidé d’être là. Vraiment là. Pas pour soigner. Pas pour corriger. Juste pour écouter, tenir la main quand tout vacillait.

Un soir, il lui avait dit

C’était en février. Il neigeait doucement. Ils étaient encore une fois assis au bord de ce canal, là où tout avait commencé. Il avait pris une grande inspiration.

Tu sais, Élise… ce que tu m’as dit l’autre jour… quand tu m’as juste demandé si je voulais que tu restes… c’est la première fois depuis longtemps que je n’ai pas eu envie de disparaître.

Elle n’avait rien répondu. Juste souri.

Elle savait, maintenant.

Des mots justes pour apaiser

La bipolarité n’est pas un tabou, et encore moins une faiblesse. C’est un combat, quotidien, souvent silencieux. Et nos mots peuvent devenir des armes… ou des abris.

Ce qu’il ne faut jamais dire à une personne bipolaire ? Tout ce qui nie, minimise, juge ou simplifie. Ce qu’il faut dire ? Tout ce qui accueille, soutient, respecte et reconnaît.

Et si vous ne savez pas quoi dire, parfois, un simple « je suis là » suffit.

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