coût AME 2023

Aide Médicale d’État : Pourquoi la Ministre Geneviève Darrieussecq refuse de modifier ce dispositif essentiel ?

SANTE
AME – Geneviève Darrieussecq

L’Aide Médicale d’État (AME), un dispositif mis en place en France pour garantir l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière, est au cœur d’un débat politique houleux. Tandis que certains y voient une nécessité absolue pour préserver la santé publique, d’autres soulignent son coût et réclament une meilleure gestion. Récemment, la Ministre de la Santé et de l’Accès aux soins, Geneviève Darrieussecq, a tranché : « Il n’est pas question d’y toucher ». Cette déclaration, prononcée lors d’une interview sur Franceinfo, a déclenché une nouvelle série de discussions, et même de tensions au sein du gouvernement. Pourquoi un tel enjeu ? Et comment comprendre la position de la Ministre ?

Un dispositif essentiel pour la santé publique

L’AME a été instaurée en 1999 avec un objectif clair : Permettre à toute personne résidant en France, même en situation irrégulière, d’accéder aux soins médicaux. Ce dispositif inclut des soins de base, mais aussi des traitements plus lourds, en cas d’urgence ou de maladies graves. À première vue, il s’agit d’une mesure humanitaire, visant à offrir un minimum de dignité aux personnes exclues des systèmes de santé traditionnels. Mais pour Geneviève Darrieussecq, l’AME n’est pas qu’une question de solidarité : Elle est aussi un bouclier pour la santé publique.

En rappelant qu’elle est avant tout médecin, la Ministre a insisté sur l’importance de l’AME dans la lutte contre les maladies contagieuses. « Si nous ne soignons pas les personnes en situation irrégulière, des maladies graves ou infectieuses pourraient se propager dans toute la population. L’AME est donc une protection pour tous les Français »,a-t-elle expliqué.

Cet argument de santé publique a souvent été mis en avant par les défenseurs de l’AME. En soignant les étrangers, non seulement l’État garantit leur droit fondamental à la santé, mais il empêche également la résurgence de maladies comme la tuberculose, qui pourraient se propager si elles n’étaient pas traitées chez certaines populations vulnérables. C’est un des points clés du rapport de Claude Evin et Patrick Stefanini, publié en décembre 2023, qui soutient que l’AME est « un dispositif bien contrôlé et utile ».

Des chiffres qui interrogent

Cependant, malgré ces justifications sanitaires, le coût de l’AME reste un sujet de débat. En 2023, ce dispositif a coûté à l’État environ 1,2 milliard d’euros. Un chiffre qui fait grincer des dents certains responsables politiques, en particulier dans un contexte d’inflation et de restriction budgétaire. Le Premier Ministre, Michel Barnier, s’était exprimé sur le sujet lors d’une interview sur France 2, estimant qu’il était peut-être temps de « mieux gérer » l’AME. Il a ajouté qu’il fallait « voir calmement les choses » pour garantir que seuls ceux qui en ont vraiment besoin puissent en bénéficier.

Cette déclaration, bien que mesurée, s’opposait clairement aux propos de Geneviève Darrieussecq. La Ministre, en se plaçant en défenseuse de l’AME, a souhaité rassurer les associations de santé et les citoyens, affirmant qu’elle ne toucherait pas à ce dispositif, sans pour autant ignorer la nécessité d’un débat apaisé. « Il ne faut pas avoir de tabou, mais pas de fantasme non plus. Nous devons discuter de l’AME avec des données factuelles et non sur la base de peurs irrationnelles », a-t-elle déclaré.

Des tensions au sein du gouvernement

L’opposition entre les positions de Michel Barnier et Geneviève Darrieussecq révèle une tension plus large au sein du gouvernement sur la gestion de la santé publique et des dépenses de l’État. D’un côté, ceux qui, comme la Ministre de la Santé, placent la santé et la prévention au premier plan, et de l’autre, ceux qui souhaitent rationaliser les dépenses dans un contexte de crise économique.

Pour les détracteurs de l’AME, le principal argument réside dans le coût jugé trop élevé. Certains affirment qu’une meilleure gestion, voire une réforme en profondeur, permettrait de réduire le nombre de bénéficiaires ou de limiter les types de soins pris en charge. D’autres vont plus loin et prônent la suppression pure et simple de ce dispositif.

Pourtant, les chiffres montrent que l’AME ne représente qu’une infime partie des dépenses publiques liées à la santé. En comparaison, les coûts des hôpitaux publics ou de la sécurité sociale sont bien plus élevés. De plus, comme le souligne le rapport de Claude Evin, la majorité des soins prodigués dans le cadre de l’AME sont des soins d’urgence, souvent pour des maladies graves. Réduire l’accès à ces soins pourrait entraîner des situations encore plus coûteuses pour l’État à long terme, en raison de la dégradation de l’état de santé des populations non soignées.

Un débat sociétal complexe

Au-delà des chiffres et des arguments médicaux, le débat sur l’AME touche aussi à des questions plus profondes : Comment la France, pays des droits de l’homme, doit-elle traiter les étrangers en situation irrégulière ? Doit-elle leur offrir les mêmes droits que les citoyens, notamment en matière de santé, ou au contraire, limiter leur accès aux services publics ?

Pour Geneviève Darrieussecq, la réponse est claire. « Nous avons un devoir moral envers ces personnes, mais aussi envers les Français. En les soignant, nous protégeons l’ensemble de la population », a-t-elle déclaré. Sa prise de position, bien que tranchée, s’inscrit dans une vision de santé publique inclusive et préventive. Elle a également souligné que « l’AME est strictement encadrée », un point important pour contrer les critiques sur les abus supposés de ce dispositif.

L’avenir de l’AME

Pour l’instant, il semble peu probable que l’AME soit modifiée de manière significative sous le mandat de Geneviève Darrieussecq. Toutefois, le débat sur sa gestion ne disparaîtra pas pour autant. Michel Barnier, en tant que Premier Ministre, pourrait bien tenter de pousser pour une réforme en douceur, tout en évitant de remettre en cause le cœur du dispositif.

Ce qui est sûr, c’est que l’AME continuera à alimenter les discussions au sein de la société française. Entre santé publique, coût économique et impératifs moraux, la question de l’accès aux soins pour les étrangers en situation irrégulière restera un sujet sensible, tant pour les responsables politiques que pour les citoyens.

L’enjeu de ce débat dépasse la simple question budgétaire : Il touche à l’âme même du système de santé français, fondé sur l’idée que chaque individu a droit aux soins, quelles que soient ses origines ou sa situation administrative.

Conclusion : L’Aide médicale d’État est un pilier fondamental de la politique de santé publique en France. Malgré les tensions au sein du gouvernement, Geneviève Darrieussecq a réaffirmé son engagement envers ce dispositif. Si les questions de coût et de gestion peuvent légitimement être soulevées, l’AME reste un outil essentiel pour préserver la santé de tous, y compris les Français.

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