Mariage de complaisance ou abus de pouvoir ? Retour sur le refus de mariage à Bourg-lès-Valence et ses répercussions juridiques.

Une maire refuse de marier un couple franco-tunisien… et risque 5 ans de prison !

SOCIETE

Ce n’est pas un conte de fées, mais un récit bien réel. Un fait divers devenu affaire d’État. Une simple cérémonie de mariage, empêchée par une décision municipale, soulève aujourd’hui un débat brûlant entre devoir moral et obligation légale.

Tout commence un matin d’avril 2025, dans les couloirs calmes de la mairie de Bourg-lès-Valence, une ville paisible de la Drôme. Là, Marlène Mourier, maire Les Républicains et élue depuis 2014, feuillette un dossier. À première vue, rien d’inhabituel : Un couple veut se marier. Lui est Tunisien, elle est Française. Le dossier est complet. L’amour, en apparence, aussi.

Mais un détail trouble l’élue. Lors de l’audition préalable, l’homme aurait confié qu’il se mariait « pour obtenir des papiers ». Ces mots-là résonnent, vibrent, explosent même dans l’esprit de la maire. Le soupçon s’insinue. S’agit-il d’un mariage de complaisance ? Ou pire : d’un mariage blanc, monté uniquement pour régulariser une situation administrative ?

Le doute d’une élue face à la mécanique administrative

Dans l’ombre du bureau municipal, Marlène Mourier se retrouve confrontée à un dilemme. D’un côté, l’intuition — ce flair politique et humain que les maires invoquent souvent comme boussole. De l’autre, la loi. Et cette loi est claire : tout refus de célébrer un mariage doit être motivé par des preuves tangibles, et non de simples impressions.

Alors, elle s’accroche à son doute. Elle refuse de célébrer le mariage.

Elle ne convoque pas les cloches ni les dragées. Elle convoque l’État civil et notifie son refus au procureur. En parallèle, une enquête est diligentée. Les services de police auditionnent le couple, vérifient les informations, mais ne trouvent rien de répréhensible. Aucun indice de fraude. Aucune preuve de manipulation sentimentale ou administrative.

Malgré cette absence d’éléments accablants, Marlène Mourier maintient sa position. Pour elle, célébrer ce mariage reviendrait à cautionner une mascarade.

Le parquet tranche : Mariage doit être

Mais la justice, elle, ne se laisse pas guider par les impressions. Le parquet de Valence décide de trancher. Le mariage doit avoir lieu. Point final.

La maire, pourtant, ne s’exécute pas. Et ce refus d’obéir à une injonction judiciaire n’est pas sans conséquences. Car la loi prévoit des sanctions lourdes à l’égard d’un officier d’état civil qui refuserait d’accomplir ses fonctions sans justification légale.

Le Code pénal parle même d’abus d’autorité ou de discrimination, passibles de cinq ans de prison et de 75 000 euros d’amende.

La désobéissance civile d’une élue LR ?

Dans une déclaration à la presse, Marlène Mourier ne recule pas. Bien au contraire. Elle s’affiche en résistante de l’intérieur, persuadée de défendre les valeurs de la République contre des arrangements qui, selon elle, la dénaturent. « Je suis élue pour protéger l’institution du mariage », martèle-t-elle sur les ondes locales. « Pas pour valider des unions sans sincérité. »

Mais qui est-elle pour juger de l’amour d’autrui ?, s’interrogent plusieurs voix dans l’opposition locale. Est-ce là une lecture morale biaisée de la fonction de maire ? Ou bien le symptôme d’un climat politique tendu, où l’immigration et l’identité nationale se mêlent à des affaires de cœur ?

Derrière le refus, un signal politique ?

Il faut dire que Marlène Mourier n’en est pas à son premier coup d’éclat. Depuis le début de son mandat, elle affiche des positions fermes sur l’immigration, la sécurité et les valeurs de la République. Pour ses partisans, elle incarne une droite assumée, franche, qui ose dire non quand il faut. Pour ses détracteurs, elle instrumentalise son pouvoir municipal à des fins idéologiques.

Dans cette affaire, le symbole est fort : un homme étrangerune femme françaiseun mariage suspectéun refus d’élueune injonction de la justice, et peut-être bientôt… un procès contre une maire.

Les futurs époux : Victimes ou complices ?

Et dans tout cela, que devient le couple ? Eux, que personne ne nomme. Eux, dont la vie privée se retrouve projetée sous les projecteurs de l’opinion. Eux, qui n’ont commis, juridiquement, aucune infraction.

Leur histoire est aujourd’hui suspendue à la décision d’une administration, d’une justice, d’une femme élue. S’aiment-ils réellement ? Se mentent-ils l’un à l’autre ? Ont-ils été broyés par un système administratif soupçonneux, ou au contraire piégés par leur propre calcul ?

On ne le saura peut-être jamais. Ce qui est sûr, en revanche, c’est que la question du mariage de complaisance n’est pas anodine. Elle interroge la frontière entre vie privée et intérêt public. Elle bouscule l’équilibre entre amour et citoyenneté. Elle met à nu les tensions qui traversent la société française : peur de la fraude, méfiance vis-à-vis de l’étranger, crispation identitaire.

Un précédent dangereux pour les mairies de France ?

Ce cas n’est pas isolé. En 2022, déjà, une élue de la région parisienne avait été condamnée pour avoir refusé de célébrer un mariage qu’elle jugeait suspect. En 2018, dans le nord de la France, un maire avait été contraint par la préfecture de valider un mariage mixte qu’il avait tenté d’entraver.

Chaque fois, la question revient : jusqu’où va le pouvoir d’un maire face à ses convictions personnelles ? Et surtout : peut-on refuser un mariage au nom du doute, sans preuve ?

Une société fracturée entre confiance et soupçon

Au cœur de cette affaire, il y a aussi nous tous. Notre société. Notre regard sur les autres. Nos préjugés, parfois. Car derrière les décisions administratives se cachent des émotions humaines, des fractures invisibles, et des peurs collectives.

Le mariage, ce contrat d’amour devenu parfois sésame administratif, pose un dilemme moderne : comment protéger l’institution sans discriminer ? Comment filtrer les abus sans briser les cœurs sincères ? Comment faire confiance, quand le soupçon s’installe partout ?

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