Je vis dans un appartement glacial l’hiver, brûlant l’été. L’humidité envahit mes murs, le chauffage coûte une fortune et malgré mes plaintes, rien ne change. Suis-je en droit de demander un remboursement de loyer ? Est-ce que mon logement est une passoire thermique ? Si oui, que puis-je faire concrètement pour faire valoir mes droits ?
Camille n’aurait jamais cru que son rêve d’indépendance allait virer au cauchemar énergétique. Quand elle signa le bail de son charmant T2 en pierre bordelaise, elle s’imaginait déjà cocooner avec un bon livre sous un plaid, une tasse de thé fumante à la main. Mais très vite, le rêve se fissura, tout comme les murs de son appartement.
Les premières semaines furent supportables. Mais à l’approche de l’hiver, Camille dut se rendre à l’évidence : Son logement était une passoire thermique. Le froid semblait s’infiltrer par les fenêtres comme un voleur silencieux. Elle empilait les couches de vêtements, multipliait les radiateurs d’appoint, voyait ses factures grimper en flèche… Et malgré tout, grelottait chaque soir.
Le diagnostic énergétique, visible en bas de son bail, indiquait une lettre “F”. Elle n’y avait pas prêté attention à la signature du contrat. Erreur de débutante, qu’elle paierait cher. Pourtant, ce simple détail allait devenir la clef de sa reconquête.
Comprendre ce qu’est une passoire thermique
Le terme désigne un logement particulièrement énergivore. En clair, un lieu mal isolé, où les déperditions de chaleur sont telles que la consommation d’énergie pour le chauffer ou le climatiser devient déraisonnable.
Le DPE (Diagnostic de Performance Énergétique) classe les logements de A (très économe) à G (très énergivore). Les passoires thermiques sont classées F ou G.
Dans le cas de Camille, le DPE affichait fièrement un “F”, synonyme de logement indécent selon la loi Climat et Résilience votée en 2021, et progressivement appliquée.
Ce que dit la loi : Un logement doit être “décent” pour être loué
En France, la loi interdit de louer un logement indécent. Depuis le 1er janvier 2023, un critère de performance énergétique minimale est exigé. À ce titre, les logements classés G+ (consommant plus de 450 kWh/m²/an) sont interdits à la location. Cette interdiction s’étendra aux classes F en 2028.
Mais au-delà des échéances, le locataire a des droits dès aujourd’hui. Un logement présentant des problèmes d’isolation importants peut faire l’objet d’une demande de travaux, voire d’un réajustement de loyer, voire d’un remboursement partiel si les conditions de vie s’en trouvent gravement altérées.
Dans quels cas peut-on demander un remboursement de loyer ?
Camille a fini par consulter une association de défense des locataires. Là, elle découvre qu’elle peut :
- Faire constater l’indécence énergétique du logement par un expert ou un diagnostiqueur certifié.
- Envoyer un courrier en recommandé à son bailleur, lui demandant d’effectuer les travaux nécessaires pour rendre le logement conforme à la décence légale.
- Saisir la commission départementale de conciliation si le bailleur refuse d’agir.
- En dernier recours, saisir un tribunal judiciaire, accompagnée de preuves, pour demander :
- une réduction de loyer.
- une indemnisation pour troubles de jouissance.
- un remboursement partiel des loyers déjà versés si les conditions d’hébergement étaient clairement contraires à la dignité humaine.
Les preuves nécessaires pour faire valoir ses droits
Dans son dossier, Camille a joint :
- Le DPE classant le logement en F.
- Ses factures d’électricité des six derniers mois.
- Des photos des fenêtres mal jointées et de l’humidité sur les murs.
- Un témoignage de son médecin évoquant une aggravation de son asthme.
- Et surtout : un rapport d’audit énergétique indépendant, prouvant l’inefficacité énergétique du logement.
L’affaire se règle… au tribunal
Face à l’inaction de son bailleur, Camille n’a pas eu d’autre choix. Grâce à l’appui juridique de l’association, elle saisit le tribunal judiciaire. Après six mois d’attente, le juge lui donne raison :
- Travaux de rénovation thermique exigés sous 6 mois.
- Remboursement de 30% des loyers perçus sur l’année écoulée, soit près de 2 400 euros.
- Suspension de l’augmentation du loyer jusqu’à la fin des travaux.
Et après ?
Aujourd’hui, les travaux ont enfin commencé. L’isolation a été refaite, le simple vitrage remplacé. Camille respire à nouveau — au sens propre comme au figuré.
Et surtout, elle veut que son histoire serve d’exemple.
“Beaucoup de locataires n’osent pas parler, pensent qu’ils doivent juste s’adapter. Mais un logement indécent est illégal. Il faut se battre, même si c’est long. Moi, je l’ai fait. Et je recommencerais.”
Un logement énergivore n’est pas une fatalité : Agir, c’est reprendre le contrôle
La loi française protège les locataires contre les passoires thermiques, à condition de savoir faire valoir ses droits. Si vous vivez dans un logement classé F ou G au DPE, que vos factures d’énergie explosent, que votre santé se dégrade ou que vos conditions de vie deviennent insupportables, vous êtes en droit d’agir.
Et dans certains cas, oui : vous pouvez obtenir un remboursement de votre loyer.