“Depuis 2008 je ne recrute plus de Français” : le témoignage sans filtre d’un vigneron du Beaujolais sur la réalité des vendanges.

Vendanges 2025 : Ce viticulteur du Beaujolais explique pourquoi il ne recrute plus de Français

EMPLOI

Les coteaux du Beaujolais s’étendent à perte de vue, baignés d’une lumière dorée de fin d’été. Le parfum sucré des grappes mûres flotte dans l’air, rappelant à ceux qui passent que les vendanges ont commencé. Pourtant, derrière cette image de carte postale, se cache une réalité plus sombre, que le viticulteur David Ratignier a choisi de livrer, presque comme un cri d’alerte.

Dans un témoignage diffusé sur RMC/BFMTV le 29 août 2025, il raconte son désarroi : « Les Français abandonnent au bout de deux jours. Depuis 2008, j’ai arrêté d’essayer de recruter localement. » Ces mots claquent comme un constat amer, forgé par près de deux décennies de vendanges décevantes en matière de main-d’œuvre française.

Une équipe cosmopolite pour sauver la récolte

Pour faire face à la réalité du terrain, David a dû se tourner vers l’étranger. Cette année, son équipe de 40 vendangeurs se compose de 27 Bulgares, 4 Tchèques et seulement 5 Français. Mais même parmi ces derniers, il faut nuancer : Deux sont des enfants, d’autres proches de la retraite, et les seuls encadrants viennent eux-mêmes de cette génération désormais éloignée du travail de la terre.

Ce déséquilibre n’est pas le fruit du hasard mais celui d’un engrenage qui dure depuis longtemps. Selon lui, les Français manquent d’endurance et d’envie face aux contraintes physiques du travail. Le viticulteur le résume d’une phrase cinglante : « Ils restent deux jours, ils sont fatigués, ils se plaignent. »

Une question de fiabilité, pas de salaire

Contrairement aux idées reçues, le problème n’est pas financier. David précise que les salaires sont proches, voire légèrement avantageux pour les étrangers : 86 € net par jour pour un Bulgare contre 82 € pour un Français. Les saisonniers étrangers bénéficient également du logement et du transport inclus, preuve que le viticulteur fait tout pour fidéliser son équipe.

À ses yeux, ce qui compte avant tout, c’est la fiabilité. Une vendange ne dure que 15 à 20 jours : impossible pour lui de se permettre des départs en cascade. « J’ai besoin d’une équipe soudée sur laquelle je peux compter, je n’ai pas envie qu’ils m’abandonnent au bout de deux jours », confie-t-il, la voix lourde de résignation.

Le décalage avec France Travail

Le viticulteur dénonce également le fossé entre le discours officiel et la réalité. « France Travail nous demande de motiver les allocataires du RSA, en leur disant que les vendanges sont ludiques, sympas et qu’ils ne perdront pas leurs droits. Mais sur le terrain, c’est une autre histoire ».

Cette phrase illustre bien le décalage entre l’image idéalisée des vendanges, souvent décrites comme une expérience conviviale, et la dureté du travail physique, répétitif et exigeant.

Une image symbolique de l’agriculture française

Le témoignage de David Ratignier n’est pas seulement celui d’un homme fatigué par les déceptions. C’est celui de toute une profession, confrontée depuis des années à une crise de main-d’œuvre locale. Les vendanges, autrefois rite de passage pour des générations entières de jeunes Français, semblent aujourd’hui appartenir à une époque révolue.

Sous le ciel doré du Beaujolais, les mains étrangères se succèdent sur les ceps, récoltant le fruit d’un sol français que trop peu de compatriotes acceptent encore de travailler. Et pendant que les grappes tombent dans les paniers, une autre question, plus vaste, s’impose : Qui, demain, acceptera encore de nourrir les terroirs de France ?

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