La RATP et la région Île-de-France ont fait don de bus aux Tunisiens : retour complet sur l’origine, le contexte et la colère des Français.

165 bus offerts à la Tunisie : Ce don controversé de la RATP et de la région Île-de-France fait polémique

SOCIETE

Des moteurs qui ne vrombissent plus à Paris… mais qui renaissent à Tunis

Ils portaient encore, sur leurs flancs, les traces invisibles des Jeux olympiques de Paris 2024. Les bus Citélis, ces mastodontes du transport urbain, avaient sillonné les artères de la capitale, transportant des milliers de passagers vers leurs vies ordinaires. Mais leur dernier voyage, eux-mêmes l’ignoraient encore, n’allait pas les ramener au dépôt, ni au centre de recyclage… mais au port de Tunis.

Ce sont 165 bus, issus des stocks de la RATP et de la région Île-de-France, qui ont été officiellement donnés à la Tunisie en deux temps : 80 livrés en avril 202585 en juin, comme le confirme fièrement l’ambassade de France en Tunisie dans une publication sur le réseau X (ex-Twitter) : « Promesse tenue !« 

Mais derrière ce geste diplomatique, se cache une polémique bien française, en trois mots devenus viraux : C’est Nicolas qui paie.”

Une “générosité” française scrutée à la loupe

Pourquoi cette phrase ? Parce que pour beaucoup de contribuables, ce don n’a rien d’un cadeau innocent. Il est financé, estiment-ils, par les impôts du citoyen moyen. Nicolas. Emma. Fatima. Jean. Eux qui prennent encore parfois un bus bondé, mal entretenu, dans leur commune d’Île-de-France, voient partir 165 véhicules encore bons pour rouler… ailleurs.

Ce don soulève des questions. Quel est son coût réel ? Qui l’a décidé ? Quelle en est la contrepartie ?

Selon les services de la Direction générale du Trésor, la Tunisie avait acheté 600 bus d’occasion pour 6 millions d’euros en 2024. Mais pour ces 165-là, aucun paiement n’est mentionné, car ils seraient “trop anciens pour être réaffectés” en France, justifie-t-on.

Des bus à l’abandon ou un geste de coopération internationale ?

Pour la région Île-de-France, présidée par Valérie Pécresse, cette opération relève de la “bonne gestion publique”. Mieux vaut offrir ces véhicules que de les stocker ou les détruire à grands frais. À cela s’ajoute l’argument de la coopération internationale : Aider la Tunisie à améliorer son réseau de transport urbain, notamment en matière d’accessibilité pour les personnes handicapées, car ces bus sont tous équipés pour les PMR, ayant servi lors des Jeux paralympiques.

Mais dans une France où l’inflation grignote les budgets, où les services publics sont souvent saturés, où les usagers d’Île-de-France dénoncent les retards, les coupures et les rames vétustes du RER, ce geste est perçu comme une provocation silencieuse.

Sur les réseaux : “Et nous alors ?”

Les réseaux sociaux se sont vite emparés de l’affaire. Le hashtag #CestNicolasQuiPaie s’est propagé comme une traînée de poudre. Certains dénoncent une hypocrisie écologique : Pourquoi ne pas rénover ces bus pour prolonger leur durée de vie en France ? D’autres évoquent un “cadeau politique” à un pays avec lequel la relation diplomatique est parfois tendue.

“Quand c’est pour envoyer du matériel à l’étranger, l’argent est toujours là. Quand c’est pour rénover nos hôpitaux ou nos transports, on nous dit que le budget est serré.”, écrit un internaute sur X.

Tunisie : Un accueil enthousiaste mais discret

Côté tunisien, l’arrivée des bus est bien réelle. En parallèle, la Tunisie a également signé un contrat d’acquisition avec un constructeur chinois pour 300 nouveaux bus, dont 111 ont déjà été livrés. Le pays tente de rajeunir son parc automobile, souvent vétuste. Mais ce don français, bien que salué officiellement, n’a pas été surmédiatisé localement.

Dans la rue, les chauffeurs tunisiens sont pragmatiques. “Un bus qui roule, c’est toujours bon à prendre. Et ceux-là sont bien plus modernes que ce qu’on a connu.”, confie l’un d’eux au micro d’une radio locale.

Un symbole de plus dans une diplomatie à géométrie variable

Le don des 165 bus n’est pas qu’une opération logistique. Il devient le miroir d’une tension permanente entre la volonté d’apparaître comme une grande puissance solidaire… et le ressenti de certains citoyens français qui ont le sentiment d’être oubliés, eux, chez eux.

Ce n’est pas la première fois qu’un tel élan soulève l’indignation. Récemment encore, la France avait offert du matériel médical, des pompes à eau ou encore du mobilier scolaire à divers pays du Maghreb ou d’Afrique subsaharienne, toujours au nom de la coopération.

Mais cette fois, l’image est plus tangible, plus visuelle : Ces 165 bus Citélis, bien visibles, bien identifiables, sont les témoins d’une question que beaucoup murmurent… mais que peu osent poser à voix haute : Peut-on encore tout donner, quand tant reste à faire, ici ?

Une histoire de roues… et de valeurs

Le ronronnement des moteurs Citélis s’est tu à Paris, mais il résonne à Tunis. Entre logistique, diplomatie et indignation citoyenne, ce convoi de bus n’est pas seulement un transfert de matériel. C’est un révélateur de priorités politiques, un miroir tendu aux Français, et un symbole roulant de notre époque.

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