Menacée, humiliée, réduite au silence : l’ex-députée LFI Danielle Simonnet accuse Jean-Luc Mélenchon de harcèlement moral et de violences politiques au sein même du mouvement qu’elle a contribué à bâtir.

Danielle Simonnet : Harcelée et menacée par Mélenchon, elle brise enfin l’omerta

POLITIQUE

L’orage grondait depuis longtemps dans les couloirs feutrés de La France Insoumise, mais personne n’osait réellement en parler. Jusqu’à ce jour d’avril 2025, où une voix se leva. Une voix familière, longtemps fidèle, longtemps loyale, mais désormais déterminée à ne plus se taire. Danielle Simonnet, ex-députée de Paris, militante de la première heure, révéla alors ce que beaucoup soupçonnaient sans oser le dire : Au cœur même du mouvement fondé sur l’émancipation, le respect et la démocratie participative, elle dit avoir vécu ce qu’elle qualifie de harcèlement moral et politique. Et cette violence, venue selon elle de Jean-Luc Mélenchon lui-même, n’était pas métaphorique.

Une fidélité longue de vingt ans

Danielle Simonnet n’était pas une militante ordinaire. Née dans le feu des luttes sociales, élevée à la lumière des collectifs, elle avait rejoint Jean-Luc Mélenchon bien avant que son nom ne devienne un emblème de la gauche radicale française. Elle croyait en lui. En sa vision, en ses colères utiles, en ses discours fleuves. Ensemble, ils avaient défendu les quartiers oubliés, les jeunes sans avenir, les précaires et les invisibles. Ensemble, ils avaient levé le poing contre l’austérité, les violences policières, les inégalités structurelles.

Mais parfois, ce que l’on construit ensemble peut se transformer en piège. Et ce fut précisément ce que Danielle Simonnet raconte aujourd’hui avec douleur.

Le message qui a tout fait basculer

Tout débuta, ou plutôt se cristallisa, à l’aube des élections législatives de 2022. Danielle, députée sortante de la 15e circonscription de Paris, découvre qu’une autre femme, Sophia Chikirou, proche parmi les proches de Mélenchon, lorgne sur « sa » circonscription. Un duel d’influence ? Une manœuvre politique ? Simonnet refuse de céder sa place. Elle estime l’avoir méritée. Elle l’a gagnée sur le terrain, dans les marchés, dans les foyers, dans les meetings.

Mais ce refus ne passe pas. Très vite, les tensions montent. Et un soir, alors qu’elle consulte ses messages sur un téléphone usé par les années de militantisme, elle découvre ce texto venu de Mélenchon :

« Je vous passerai tous à la trappe. J’attends d’être scrupuleusement entendu. »

Un message. Quelques mots. Un coup de tonnerre.

Menaces, isolement, mise à l’écart

Ce ne fut pas un incident isolé, selon Simonnet. Elle raconte, dans l’émission Complément d’enquête diffusée le 24 avril 2025 sur France 2, qu’elle aurait reçu plusieurs messages à caractère intimidant, entre 2021 et 2022, alors que les investitures de LFI étaient au cœur d’une guerre d’ego et de pouvoir.

Elle décrit des discussions « violentes« , des échanges où le débat n’existait plus, où seul le rapport de force prévalait. « On m’a humiliée, on a tenté de m’écraser. On m’a regardée comme une traîtresse, alors que j’ai simplement voulu rester fidèle à mes engagements. »

À l’intérieur de LFI, les langues restaient liées. Certains parlaient « d’engueulades« , de simples tensions politiques. Mathilde Panot, présidente du groupe à l’Assemblée, a même tenté de minimiser l’affaire, la réduisant à de « banales disputes internes« . Mais Simonnet, elle, parle de violence absolue, d’un harcèlement moral orchestré par celui qu’elle avait soutenu durant deux décennies.

Une exclusion sans mot dire

En 2024, l’année de tous les bouleversements. La France est en crise. Une dissolution surprise de l’Assemblée entraîne des législatives anticipées. C’est l’heure des investitures. Mais cette fois, Simonnet n’y est pas. Aucun mot, aucun message, aucune explication. LFI l’ignore. On ne lui reproche rien officiellement. On ne l’exclut pas formellement. On ne lui écrit même pas pour lui signifier son remplacement.

Elle comprend : Elle est radiée de fait. Mise à l’écart sans procès. Une disparition politique silencieuse, orchestrée avec une précision chirurgicale.

Mais Danielle Simonnet refuse d’abandonner la lutte. Forte de son ancrage local, elle se présente sous une autre étiquette : Celle des Verts, alliée aux anciens frondeurs de LFI. Elle est réélue. Elle prouve que les électeurs, eux, n’ont pas oublié.

Une nouvelle voie : L’Après

Aux côtés d’autres anciens insoumis déçus, Simonnet confonde l’Après — pour Association pour une République écologique et sociale. Ce n’est plus seulement un mouvement politique. C’est un refuge, un espace de reconstruction, une alternative. Elle y défend les mêmes causes : Le droit au logement, l’égalité femmes-hommes, la justice climatique. Mais cette fois, elle le fait sans la pression d’un leader autoproclamé, sans devoir se taire pour ne pas froisser les hautes sphères.

Elle donne des conférences. Elle publie. Elle témoigne. Et quand France 2 lui propose de s’exprimer, elle accepte. Non pour se venger, mais pour alerter. Parce qu’elle sait que d’autres, derrière elle, peut-être dans d’autres partis, vivent des choses similaires. Parce qu’il faut dire que même dans les mouvements se réclamant du peuple, le pouvoir peut devenir toxique.

Mélenchon garde le silence

Jean-Luc Mélenchon, interpellé par la presse, choisit de ne pas répondre. Pas un mot, pas une ligne. Son entourage évoque « un non-événement« , une « interprétation personnelle » de Danielle Simonnet. On sent la mécanique bien rodée. Minimiser. Ignorer. Avancer.

Mais cette fois, la machine grince. L’image de LFI, déjà fragilisée par des accusations de verticalité, d’autoritarisme et de culte du chef, en prend un nouveau coup. Et les militants, les électeurs, commencent à douter.

Une prise de parole historique

Ce que Danielle Simonnet vient de faire, en vérité, dépasse son cas personnel. Elle a ouvert une brèche. Elle a brisé une forme d’omerta au sein de la gauche radicale. Elle a dit, sans haine mais avec fermeté, qu’on ne peut pas défendre les opprimés tout en écrasant ses camarades. Qu’un leader ne vaut pas plus que ses militants. Que la révolution n’est rien si elle n’est pas éthique.

Aujourd’hui, dans les rues de Paris, elle continue d’aller à la rencontre des citoyens. Elle sourit moins qu’avant, mais ses yeux brillent toujours de la même flamme. La flamme de celles et ceux qui, un jour, ont décidé de ne plus se taire.

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