Maëlys : “Et si faire taire une chaîne télé n’était plus un fantasme d’indignés, mais une procédure citoyenne minutieusement orchestrée ?”
Thomas Guénolé : Le plan d’un citoyen républicain pour faire taire CNews
Dans le tumulte médiatique où les plateaux télévisés dégénèrent souvent en arènes politiques sans filtres, une voix s’élève. Pas pour débattre, mais pour désarmer. Celle de Thomas Guénolé. Loin des éclats de L’Heure des pros, ce politologue entend jouer la carte de la légalité citoyenne. Son objectif ? Ni plus ni moins que la fermeture pure et simple de CNews. Non par violence. Par procédure. Par devoir républicain.
Un politologue dans la tempête
Le 17 juin 2024, sur son compte X (anciennement Twitter), Thomas Guénolé ne publie pas un énième pamphlet contre la chaîne d’information du groupe Canal+. Il publie un mode d’emploi, un véritable guide d’activisme légal pour “faire fermer CNews par l’ARCOM”.
Ce plan n’est pas un rêve de gauche radicale. C’est une stratégie méthodique, axée sur un levier administratif : Le signalement citoyen.
Le principe est simple : cibler une émission polémique, en l’occurrence L’Heure des pros animée par Pascal Praud, pour l’inonder de signalements auprès de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM). Un harcèlement légal pour contraindre l’institution à sortir de son silence.
Cibler le cœur de la machine : L’Heure des pros
Pourquoi cette émission ? Parce qu’elle cristallise tout ce que Guénolé considère comme toxique dans le paysage audiovisuel : Banalisation de discours extrêmes, traitement unilatéral de certains faits divers, mise en avant répétée d’intervenants identifiés à l’extrême droite ou à la droite radicale. Pour lui, CNews “ne respecte pas les obligations de pluralisme” imposées à tout service de télévision.
La méthode consiste à signaler chaque séquence problématique de L’Heure des pros. Mais pas n’importe comment. Guénolé fournit un tutoriel précis :
- Aller sur le site de l’ARCOM
- Choisir la chaîne concernée
- Sélectionner le jour et l’heure de diffusion
- Décrire précisément le contenu contesté
- Citer les obligations légales non respectées
- Répéter, quotidiennement, inlassablement
Du signalement au sabordage ?
L’idée de Guénolé ne s’arrête pas à faire pression sur une émission. Il vise à multiplier les rappels à l’ordre contre la chaîne entière, jusqu’à une suspension de diffusion, voire un retrait de fréquence.
Pour cela, il exhorte les internautes à documenter les propos tenus, à conserver les enregistrements, à lister les intervenants polémiques. Il transforme ainsi l’audience passive en corps de contrôle civique.
Il appelle cela “un devoir républicain”. Une formule qui fait réagir. Car en face, les partisans de CNews hurlent à la censure, à la tyrannie idéologique, au maccarthysme inversé.
Réactions : Entre soutien citoyen et indignation médiatique
D’un côté, des internautes séduits par l’idée d’une riposte légale face à ce qu’ils considèrent comme une dérive médiatique quotidienne. De l’autre, des personnalités du monde journalistique qui dénoncent une attaque contre la liberté d’expression, voire une stratégie totalitaire.
CNews, de son côté, répond en rappelant que ses éditorialistes sont “libres de penser et de s’exprimer”, dans le cadre du débat public. La chaîne se réfère à la Déclaration des droits de l’homme, et rappelle que l’ARCOM ne l’a jamais lourdement sanctionnée malgré de nombreuses alertes.
Un précédent ? Oui, mais jamais jusqu’à la fermeture
Jamais encore une chaîne française n’a été fermée à la suite d’un mouvement citoyen de signalements. Des sanctions, oui : Mises en demeure, amendes, rappels à l’ordre. Mais jamais de coupure de signal.
Le plan de Guénolé est donc à la fois audacieux et inédit. Il repose sur l’idée que la démocratie ne s’arrête pas au droit de parler, mais s’exerce aussi par la vigilance collective.
Un affrontement idéologique plus vaste
Car au fond, cette affaire n’est pas seulement technique ou réglementaire. Elle met en lumière un clivage profond :
- D’un côté, ceux qui voient dans CNews un contre-pouvoir nécessaire, une voix dissidente face à un “système médiatique de gauche”.
- De l’autre, ceux qui la considèrent comme un outil de propagande, flirtant en permanence avec l’agenda identitaire de l’extrême droite.
Thomas Guénolé, lui, se revendique du camp républicain. Celui qui oppose à la haine des procédures, à l’intimidation la loi, à la démagogie un manuel d’auto-défense démocratique.
Un signalement peut-il éteindre un signal ?
À travers ce plan minutieux, Thomas Guénolé replace la question du rôle citoyen au centre du débat médiatique. Il ne propose pas une révolution. Il propose une procédure, un droit à exercer. Il transforme la télécommande en arme civique.
Mais ce combat ne fait que commencer. Il reste à savoir si l’ARCOM écoutera ces signalements massifs… ou s’ils se perdront dans le grand silence des institutions qui, bien souvent, préfèrent éviter le tumulte.