Théo Clerc revient de l’enfer : emprisonné 422 jours pour un graffiti, il raconte son calvaire et sa libération.

Théo Clerc emprisonné 422 jours en Azerbaïdjan pour un simple graffiti : Récit d’un cauchemar diplomatique

CHOC

Une envie d’ailleurs, un vol pour Bakou

Tout avait commencé comme une simple escapade artistique. Théo Clerc, 38 ans, street-artiste passionné par l’architecture soviétique et les ambiances post-industrielles, rêvait depuis longtemps de découvrir Bakou. Fasciné par le contraste brutal entre les tours futuristes de Flame Towers et les ruelles ancestrales de la vieille ville, il avait embarqué en mars 2023 à Paris sans imaginer un seul instant que ce voyage allait changer sa vie.

Son objectif était simple : Photographier les fresques, comprendre la culture urbaine locale… et pourquoi pas, laisser une trace, discrète, poétique, sur un mur oublié.

Une nuit, une bombe de peinture… et la descente aux enfers

Le 27 mars, après une soirée passée à arpenter les souterrains du métro de Bakou, Théo sort une petite bombe de peinture blanche de son sac. Trois lettres : « ART ». Rien d’insultant, rien de politique. Juste son code signature, discret, comme il l’avait fait mille fois ailleurs. Mais dans ce pays où le pouvoir se veut implacable et où la critique, même implicite, est scrutée à la loupe, ce geste fut l’étincelle.

Arrêté dès le lendemain à son hôtel par des agents en civil, il fut menotté sans explication. Son passeport confisqué. Interrogé pendant des heures dans un anglais approximatif. On lui reprochait d’avoir « dégradé un bien public à des fins de propagande occidentale ». Une accusation surréaliste qui allait l’enfermer 422 jours.

Le silence des murs

La prison de Keshla, en périphérie de Bakou, n’était pas censée accueillir des artistes. Pourtant, Théo y restera près de 14 mois. Vêtu d’un uniforme gris, il partageait une cellule de 9m² avec trois codétenus. Peu parlaient anglais. Il passait ses journées à dessiner mentalement sur les murs. Pas de papier, pas de stylo. Il récitait des vers de Prévert pour ne pas sombrer.

Les lettres de sa famille ? Rares. Les visites consulaires ? Épisodiques. Officiellement, Théo était un « inculpé pour atteinte au patrimoine ». Officieusement, il était devenu un pion dans une partie d’échecs diplomatique entre Paris et Bakou.

L’oubli, puis le réveil médiatique

En France, seuls quelques amis alertent sur les réseaux sociaux. Puis le silence. Jusqu’à ce qu’une ONG spécialisée dans la défense des artistes emprisonnés, Artwatch, dévoile son cas. L’article fait le tour des rédactions. TF1, France Info, Le Monde : En quelques jours, son nom devient un symbole.

La pression monte. Le Quai d’Orsay s’en mêle. Un député français interpelle le gouvernement à l’Assemblée. L’ambassadeur d’Azerbaïdjan est convoqué. On exige la libération de Théo Clerc.

Une grâce présidentielle, une liberté surveillée

Le 21 mai 2025, après 422 jours derrière les barreaux, Théo apprend, au petit matin, qu’il va être gracié. Pas libéré immédiatement : Transféré d’abord dans un centre de rétention administratif, puis placé sous escorte à l’aéroport de Bakou. L’avion d’Air France décolle enfin le 27 mai.

Quand il pose le pied à Roissy, il ne dit rien. Il pleure. Un simple graffiti avait suffi à lui faire frôler la folie. Mais il était vivant.

Et maintenant ?

Aujourd’hui, Théo Clerc s’exprime peu. Il promet un livre, peut-être une exposition retraçant ses jours de détention. Mais surtout, il alerte : « Dans certains pays, l’art est vu comme une arme. Et les artistes comme des menaces. »

Son cas relance le débat sur la liberté artistique dans le monde, la vulnérabilité des voyageurs créatifs… et le silence qui entoure tant de détentions arbitraires.

L’art peut-il encore être libre partout dans le monde ?

Alors que les murs de Paris célèbrent à nouveau son nom, tagué à la craie par ses soutiens, Théo Clerc reste marqué à vie. Ce qu’il a vécu à Bakou dépasse l’entendement. Et pose une question glaçante : Dans un monde de plus en plus autoritaire, les artistes ont-ils encore le droit d’exister sans craindre l’exil, la prison, voire pire ?

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