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Conserves de thon : Mercure à des niveaux toxiques, l’alerte des ONG Bloom et Foodwatch

ALIMENTATION

Ce mardi 29 octobre, les associations Bloom et Foodwatch publient les résultats d’une enquête alarmante : Toutes les conserves de thon testées présentent des taux de mercure potentiellement toxiques pour la santé.

Comment un produit aussi courant et apprécié a-t-il pu devenir un danger insidieux pour les consommateurs ? Cet article explore les raisons de cette contamination, les risques pour la santé, et les actions que les ONG demandent aux autorités pour protéger les consommateurs.

Le thon en conserve : Un aliment courant chargé en mercure

Le thon est omniprésent dans l’alimentation des Français. Selon les données de FranceAgriMer, chaque habitant de l’Hexagone a consommé en moyenne 4,9 kilos de thon en 2022, une quantité surprenante si l’on considère le risque que ces produits présentent. En effet, le rapport des associations Bloom et Foodwatch révèle que toutes les boîtes de thon testées – 148 échantillons en provenance de diverses marques européennes – contiennent du mercure, et certaines à des niveaux bien au-delà des limites de sécurité.

Parmi les marques les plus mises en cause, la célèbre marque française « Petit Navire » atteint des taux de mercure de 3,9 mg par kilo, faisant d’elle la « mauvaise élève » de l’Union européenne en matière de contamination par le mercure. Ce constat inquiète particulièrement les deux associations, car les doses de méthylmercure – une forme particulièrement toxique de ce métal – présentes dans certaines de ces conserves pourraient s’avérer néfastes pour la santé humaine, en particulier pour les populations les plus vulnérables.

Méthylmercure : Un poison pour la santé

Le méthylmercure est un composé du mercure généré par des réactions chimiques dans l’eau. Lorsqu’il s’infiltre dans les milieux aquatiques, ce métal, présent naturellement dans l’environnement, peut se transformer en méthylmercure, une substance potentiellement cancérogène et particulièrement toxique pour le système nerveux humain. Les experts de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) expliquent que le méthylmercure peut gravement affecter le système nerveux central, notamment durant les phases critiques du développement comme l’in utero et la petite enfance.

La toxicité du méthylmercure est, par ailleurs, accrue par sa capacité à s’accumuler dans les organismes marins. Les poissons prédateurs comme le thon, situés en haut de la chaîne alimentaire, absorbent progressivement ces toxines. En ingérant ces poissons, les consommateurs se retrouvent exposés à des doses de mercure qui, cumulées, peuvent représenter un risque pour leur santé. Bloom et Foodwatch, dans leur rapport, soulignent que la plupart des conserves de thon vendues en Europe présentent des taux qui « dépassent la teneur de 0,3 mg de mercure par kilo« , un seuil de sécurité déjà établi pour d’autres espèces de poissons.

Un problème de normes Européennes

Les associations pointent également du doigt les réglementations en vigueur qui, selon elles, seraient obsolètes et trop permissives. Actuellement, la réglementation européenne autorise une teneur maximale en mercure de 1 mg par kilo pour le thon. Bloom et Foodwatch estiment que ce seuil devrait être revu et abaissé à 0,3 mg par kilo, alignant ainsi les normes du thon avec celles des autres poissons, qui sont moins consommés quotidiennement et dont les niveaux tolérés de mercure sont plus faibles.

Pour Julie Guterman, chercheuse et responsable de cette étude pour Bloom, « cela fait plus de trente ans que la grande distribution profite largement de ces normes faussées pour vendre des quantités astronomiques de thon contaminé au mercure« . Ce constat accablant est étayé par une analyse minutieuse des pratiques de la grande distribution, qui, selon les deux ONG, se montrerait réticente à revoir ses standards.

En réponse, Bloom et Foodwatch appellent à des « contrôles stricts » des produits en conserve et réclament l’introduction d’une « clause de sauvegarde » pour interdire la commercialisation des produits qui dépassent les seuils de sécurité. Cette mesure viserait notamment à protéger les consommateurs des effets cumulés d’une consommation régulière de thon.

Les risques pour la santé publique : Les populations à risque

Pour les consommateurs, la question de savoir s’ils sont en danger se pose inévitablement. Dans une interview accordée au Figaro en février dernier, un représentant de l’Autorité de santé expliquait que la dose quotidienne de mercure ingérée par la majorité des Français reste, dans l’ensemble, acceptable, sauf pour « moins de 1% de la population » qui consomme des quantités particulièrement élevées de thon, atteignant plusieurs centaines de grammes par semaine.

Toutefois, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) alerte sur le fait que les seuils tolérés par l’Union européenne pourraient ne pas être suffisamment protecteurs, surtout pour les femmes enceintes, les enfants en bas âge et les consommateurs réguliers de thon. En France, les autorités recommandent déjà de consommer du poisson deux fois par semaine, en diversifiant les espèces et en privilégiant les poissons gras comme le saumon ou les sardines, moins susceptibles de contenir des niveaux de mercure élevés.

Pour les femmes enceintes et les enfants en bas âge, l’Anses recommande de limiter la consommation de poissons prédateurs, notamment le thon, afin de réduire l’exposition aux substances toxiques comme le méthylmercure. En effet, des doses excessives peuvent affecter le développement du système nerveux chez les nourrissons et les jeunes enfants, exposant les plus jeunes à des retards de développement ou d’autres troubles neurologiques.

Quelles alternatives pour les consommateurs ?

Les conclusions de ce rapport posent un dilemme pour les amateurs de thon. En attendant une réglementation plus stricte, que peuvent faire les consommateurs ? Il est recommandé de varier les sources de protéines et de privilégier les poissons issus de la pêche sauvage et des espèces moins exposées au mercure, comme les sardines, les maquereaux ou le saumon, qui sont aussi riches en oméga-3.

De plus, des solutions existent pour les consommateurs soucieux de leur santé et de celle de leurs proches. En vérifiant l’origine et les normes de qualité de chaque conserve, il est possible de réduire le risque d’exposition. Opter pour des marques transparentes sur les méthodes de pêche et le contrôle qualité peut également aider à éviter les produits à risque.

Une responsabilité collective pour la sécurité des consommateurs

Face à cette crise de santé publique latente, Bloom et Foodwatch interpellent les pouvoirs publics et les distributeurs pour renforcer la réglementation et établir des seuils de tolérance plus protecteurs. En attendant, il revient à chaque consommateur de prendre des décisions éclairées, en diversifiant son alimentation et en privilégiant les produits de sources plus sûres.

Les deux ONG espèrent que leur appel sera entendu et que l’Union européenne reverra ses standards pour protéger la santé des citoyens. En fin de compte, cet appel à la vigilance doit alerter non seulement les institutions, mais aussi chaque consommateur afin que tous puissent prendre des décisions mieux informées sur la santé et la sécurité alimentaire.

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